LE FESTIN DE LA MANTE (2003)

Mue par une force surnaturelle, une femme au comportement de mante religieuse assassine chacun de ses partenaires après l’acte d’amour…

LE FESTIN DE LA MANTE

 

2003 – BELGIQUE

 

Réalisé par Marc Levie

 

Avec Lou Broclain,Yann Chely, Sacha Kollich, Adèle Jacques, Hugues Hausman, Michel de Warzee, Serge Swysen

 

THEMA INSECTES ET INVERTÉBRÉS

La Belgique s’affirme régulièrement comme l’un des derniers bastions de l’innovation et de la surprise en matière de cinéma de genre, loin du formatage américain et de l’intellectualisation française. Berceau d’œuvres aussi divergentes que Malpertuis ou C’est arrivé près de chez vous, elle nous livre en 2003 un Festin de la Mante pour le moins osé. Premier long-métrage de Marc Levie, qui en avait l’idée en tête depuis une bonne quinzaine d’années, Le Festin de la Mante raconte l’histoire d’une femme mante religieuse condamnée à occire les hommes qu’elle aime, ni plus ni moins. Mais loin des Wasp Woman et autres Le Vampire a soif, cet insecte tueur déguisé en femme n’est un monstre qu’à travers son comportement, car jamais elle ne prend l’aspect physique de la mante, Levie se refusant à user d’effets spéciaux spectaculaires. Lorsque le violoncelliste Julien la rencontre dans le sud de la France, elle lui dit se prénommer Sylvia. Tombé sous son indiscutable charme printanier, il tombe dans ses bras et l’épouse peu après. Mais la belle refuse de consommer leur amour, car elle ne veut pas perdre Julien. Or toute relation sexuelle entraîne inévitablement la mort de son partenaire. Ses précédents amants en ont fait les frais.

Alors que sa liaison avec son époux demeure frustrante et platonique, Sylvia se laisse séduire par Patrick, jeune chien fou prêt à prendre tous les risques pour pimenter sa vie. A ce dernier, elle se donne physiquement, pleinement et sauvagement. Car il lui faut assouvir son besoin meurtrier, sans lequel elle dépérira et cessera de reproduire son espèce hybride. A la fois fasciné et effrayé par cette relation étrange et autodestructrice, Patrick ignore évidemment l’issue fatale qui lui est réservée. Le chevauchant nue au moment de l’ultime extase, Sylvia serrera sa gorge dans ses mains soudain animées d’une puissance surhumaine et l’étranglera jusqu’au dernier souffle, orgasme et mort s’entremêlant ainsi inéluctablement. Lorsque Julien découvre l’amant, sa première réaction est violente et sans appel. Mais peu à peu, il comprend la véritable nature mi-femme mi-mante de son épouse. Fou d’amour, il est prêt à tous les sacrifices : la laisser en aimer un autre pour mieux le tuer, voire s’offrir lui-même en pâture aux jolies mandibules de Sylvia…

La prédatrice

Chez Marc Levie, l’amour et la mort sont donc indissociables, le fantastique est métaphorique et poétique, le prédateur prend le visage d’un ange ingénu, et les notions de fidélité, de désir et de passion s’entrechoquent loin des lieux communs de l’éternel trio amant/mari/femme. Audacieux et surprenant, Le Festin de la Mante est quelque peu desservi par une mise en scène timide qui aurait manifestement mérité des moyens plus conséquents et par l’interprétation moyennement convaincante de Yann Chely dans le rôle du terne Julien. En revanche, Lou Broclain, en troublante Sylvia au double visage, et Sacha Kollich, interprète du doux-dingue Patrick, crèvent l’écran et portent une grande partie du film sur leurs épaules. La séquence de la tarentule se promenant sur le visage de Sylvia, la première rencontre du couple illégitime ou le dénouement enlinceulé de neige font partie des moments mémorables de ce conte décidément hors norme.

 

© Gilles Penso


Partagez cet article