PRISON (1987)

Le futur réalisateur de Die Hard 2 et Cliffhanger confronte les détenus d’une prison décrépie à un spectre particulièrement virulent…

PRISON

 

1987 – USA

 

Réalisé par Renny Harlin

 

Avec Viggo Mortensen, Lane Smith, Chelsea Field, Lincoln Kilpatrick, André De Shields, Arlen Dean Snyder, Ivan Kane, Tom Lister Jr.

 

THEMA FANTÔMES I SAGA CHARLES BAND

Au milieu des années 80, Renny Harlin n’est pas encore le réalisateur de blockbusters survitaminés comme 58 minutes pour vivre, Cliffhanger ou Au revoir à jamais. Après avoir dirigé plusieurs spots de publicité et un premier long-métrage dans sa Finlande natale, il se laisse séduire par les sirènes d’Hollywood en émigrant aux États-Unis. Mais le succès ne vient pas immédiatement frapper à sa porte. Lorsque le producteur Irwin Yablans lui propose de mettre en scène Prison pour le compte de la compagnie Empire de Charles Band, il est tellement démuni qu’il vit alors dans sa voiture ! Yablans a apprécié son thriller Frontière interdite (avec le fils de Chuck Norris dans le rôle principal) et pense qu’il est l’homme de la situation. Rédigé par C. Courtney Joyner (Nuits sanglantes, Class of 1999) d’après une idée de Yablans, le scénario de Prison est retouché par Harlin qui s’investit à 100% dans le projet, dessinant lui-même des centaines de storyboards qui permettent de prévisualiser tous les plans du film. L’intrigue se situant dans une vieille prison, la production s’installe dans le pénitencier d’état du Wyoming, à Rawlins, fermé depuis 1981. Étant donné que le bâtiment est destiné à une démolition prochaine, Renny Harlin et son équipe ont la bride sur le cou en matière d’explosions et de destructions. Et pour s’octroyer une petite touche de réalisme, le film choisit parmi ses figurants de vrais détenus.

Prison démarre par un long plan-séquence en caméra subjective qui suit les pas d’un condamné sortant de sa cellule, arpentant le couloir de la mort, pénétrant dans la chambre d’exécution et s’installant sur la chaise électrique. Ce choix de point de vue accentue le caractère oppressant de la scène, insistant sur le visage lugubre des gardiens tandis que résonne confusément une prière marmonnée par un curé. Nous sommes en 1964 dans la prison de Creedmore. Le détenu Charlie Forsythe grille sous nos yeux sur la chaise électrique. Trente ans plus tard, cette maison d’arrêt à l’abandon est rouverte, faute d’un budget nécessaire pour en construire une autre flambant neuve. Un nouveau contingent de détenus débarque donc dans cette prison vétuste et insalubre, sous la direction de l’autoritaire Ethan Sharpe qui était déjà gardien des lieux plusieurs décennies plus tôt. Pendant une demi-heure, le long-métrage de Renny Harlin prend la tournure d’un film de prison « classique » collectant les passages obligatoires : la présentation d’une poignée de prisonniers au caractère trempé, le rituel des gardiens, les accès de colère du directeur, les discussions dans la cour, les tâches manuelles ingrates… Puis surviennent les éléments surnaturels, prélude à une violente descente aux enfers.

Vengeance diabolique

En tête d’affiche, on trouve un Viggo Mortensen alors inconnu du public, malgré un petit rôle dans le Witness de Peter Weir. Son charisme, son regard d’acier et sa froideur mystérieuse jouent beaucoup en faveur du film. Face à lui, Lane Smith campe un directeur tyrannique bientôt dépassé par les événements. Si la présence de l’esprit vengeur est d’abord visualisée par des effets lumineux bleutés évoquant son origine électrique, les mises à mort brutales et spectaculaires basculent volontiers dans le gore (crémations, empalements, lacérations, mutilations), sollicitant l’expertise du créateur d’effets spéciaux John Carl Buechler (Re-Animator, From Beyond). Celui-ci se fend même d’une créature démoniaque joyeusement excessive en fin de métrage. Malgré le budget modeste du film, Renny Harlin se laisse aller en matière de pyrotechnie, d’incendies, d’explosions et de cascades, avec un savoir-faire qu’il pourra pleinement exprimer dans les productions plus argentées qui lui seront confiées quelques années plus tard. Mortensen lui-même mouille la chemise en effectuant une majorité de cascades, sous la supervision du vétéran Kane Hodder (par ailleurs interprète de Jason dans plusieurs opus de la saga Vendredi 13). Certes, le scénario de Prison reste basique et son déroulement un tantinet mécanique, mais sa réalisation solide, son interprétation convaincante et son plongeon décomplexé dans l’action et l’horreur sont des atouts de poids qui rendent son visionnage extrêmement divertissant. À cause de la faillite de la compagnie Empire, le film ne sortira qu’en mars 1988, soit un an après son tournage. Renny Harlin, de son côté, enchaînera dans la foulée avec Le Cauchemar de Freddy.

 

© Gilles Penso


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