ABC OF DEATH (2012)

26 réalisateurs mettent chacun en scène une façon de mourir en suivant les lettres de l’alphabet

THE ABCs OF DEATH

 

2012 – USA / NOUVELLE-ZÉLANDE

 

Réalisé par Kaare Andrews, Angela Bettis, Ernesto Diaz Espinoza, Jason Eisener, Hélène Cattet et Bruno Forzani, Adrian Garcia Bogliano, Xavier Gens, Lee Hardcastle, Jorge Michel Grau, Noboru Iguchi, Thomas Malling, Anders Morgenthaler, Yoshihrio Nishimura, Banjong Pisanthanakun, Simon Rumley, Marcel Sarmiento, Jon Schnepp, Srdjan Spasojevic, Timo Tjahjanto, Andrew Traucki, Nacho Vigalondo, Jake West, Ti West, Ben Wheatley, Adam Wingard et Yudai Yamaguchi.

 

Avec Eva Llorach, Alejandra Urdiain, Matias Oviedo, Steve Berens, Brenden J. McVeigh, Arisa Nakamura, Martine Arnes-Sorensen

 

THEMA MORT I TUEURS I DOUBLES I MAMMIFÈRES I ARAIGNÉES I REPTILES ET VOLATILES I MÉDECINE EN FOLIE I FUTUR I ROBOTS

Le pari était fou et sacrément audacieux : produire un film d’horreur à sketches comprenant non pas quatre ou cinq segments, comme c’est l’usage, mais 26 ! C’est ainsi qu’Ant Timpson et Tim League présentent le projet aux réalisateurs venus des quatre coins du monde auxquels ils proposent de se prêter au jeu. La règle est simple : chacun d’entre eux se verra attribuer par tirage au sort une lettre de l’alphabet. Charge à eux d’imaginer un court-métrage dont le titre commence par cette lettre et qui s’achève par une mort. Les contraintes sont le temps et l’argent, comme toujours. Mais pour le reste, tout est permis : le gore, le sexe, le mauvais goût, les sujets tabous… La censure ne viendra pas entraver ABC of Death. Aucun fil conducteur narratif ne relie ces 26 films courts, si ce n’est la couleur rouge qui occupe tout l’écran au début et à la fin. Le générique de début montre un réservoir duquel s’écoulent des litres de sang qui envahissent une petite pièce dans laquelle sont éparpillés des cubes en bois où se trouvent des lettres, les mêmes qu’utilisent les enfants pour apprendre à lire. Ces blocs se mettent à flotter dans la marée d’hémoglobine. Ce sont eux qui épelleront au fur et à mesure les titres de chaque segment. L’abécédaire de l’horreur se met ainsi en marche…

Pour pouvoir caser vingt-six segments dans un seul long-métrage, le temps assigné à chaque réalisateur est forcément court. Chacun s’efforce donc d’installer un univers immédiatement identifiable en variant les plaisirs. Nous voilà ainsi face à un slasher absurde (« Apocalypse » de Nacho Vigalondo), un conte macabre (« Bigfoot » d’ Adrian Garcia Bogliano), une boucle temporelle expérimentale (« Cycle » d’Ernesto Diaz Espinoza), un combat violent tourné comme un clip (« Duel de chiens » de Marcel Sarmiento), un gag stressant avec une araignée (« Extermination » d’Angela Bettis), un délire d’un goût douteux (« Flatulences » de Noboru Iguchi), une odyssée courte en caméra subjective (« Gravité » d’Andrew Traucki), un cartoon live rétro-futuriste (« Hydro-électrocution » de Thomas Malling), un huis-clos glauque (« Injection » de Jorge Michel Grau), un duel absurde de samouraïs (« Jidai-Geki » de Yûdai Yamaguchi), un dessin animé gorgé d’humour noir (« Klutz » d’Anders Morgenthaler), un jeu malsain où se confrontent éros et thanatos (« Libido » de Timo Tjahjanto), un film très court et très incommodant (« Mal accroché » de Ti West), une histoire drôle avec un couple et une perruche (« Noces » de Banjong Pisanthanakun), une troublante expérience sensorielle (« Orgasme » d’Hélène Cattet et Bruno Forzani), une tranche de vie misérable (« Pression » de Simon Rumley), une mise en abyme comique (« Quack » d’Adam Wingard), une fable clinique et violente (« Retiré » de Srdjan Spasojevic), une cavale sans issue (« Speed » de Jake West), une facétie ultra-gore en stop-motion (« Toilette » de Lee Hardcastel), un film de monstre qui adopte le point de vue de la créature (« Unearthed » de Ben Wheatley), un récit de SF dystopique (« Vagissement » de Kaare Andrews), du grand n’importe quoi (« WTF ! » de Jon Schnepp), une satire sanglante des diktats de la mode (« XXL » de Xavier Gens), une vengeance putride (« Young Buck » de Jason Eisener) et un sketch futuriste hystérique (« Zetsumetsu » de Yoshihiro Nishimura).

L’horreur de A à Z

On le voit, ABC of Death part dans tous les sens avec une liberté de ton très appréciable. Cette diversité et les surprises qui en découlent sont les atouts majeurs du film. Revers de la médaille, avec seulement trois à six minutes pour s’exprimer, les cinéastes n’ont guère le loisir de sortir de la mécanique de l’exercice de style anecdotique, se privant la plupart du temps d’une fin digne de ce nom. La grande majorité de ces très courts-métrages s’achève donc de manière décevante, à quelques exceptions près (les chutes savoureuses de « Klutz », « Noces », « Quack », « Speed » et « XXL »). Certains bénéficient d’une recherche esthétique extrêmement soignée (« Duel de chiens », « Orgasme », « Retiré »), d’autres souffrent d’une mise à forme à la limite d’un rendu amateur (« Cycle », « Extermination », « Gravité »). C’est finalement plus à un festival du court-métrage d’horreur qu’à un film à sketches d’un seul tenant qu’il nous semble assister, sentiment qui émergeait d’ailleurs déjà face au visionnage du fameux Adrénaline de 1989 qui, en assemblant 13 films courts, se positionnait presque comme le précurseur d’ABC of Death.

 

© Gilles Penso


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