CE QUE VEULENT LES FEMMES (2000)

Mel Gibson excelle dans le rôle d’un publicitaire macho qui, du jour au lendemain, se découvre le pouvoir de lire les pensées féminines…

WHAT WOMEN WANT

 

2000 – USA

 

Réalisé par Nancy Meyers

 

Avec Mel Gibson, Helen Hunt, Marisa Tomei, Alan Alda, Ashley Johnson, Mark Feuerstein, Lauren Holly, Delta Burke

 

THEMA POUVOIRS PARANORMAUX

Aujourd’hui, le succès de Ce que veulent les femmes semble indissociable de la présence en tête d’affiche de Mel Gibson et Helen Hunt. Leur arrivée sur le film fut pourtant tardive. C’est sous le titre « Head Games » que le projet commence à circuler à partir de 1996. À l’époque, le scénario co-écrit par Josh Goldsmith, Cathy Yuspa et Diane Drake envisage l’acteur comique Tim Allen dans le rôle masculin principal. Le concept, très drôle, semble s’inspirer partiellement d’un des épisodes de La Quatrième dimension, « Un sou pour vos pensées », écrit par George Clayton Johnson et diffusé une première fois en 1961. Mais le projet traîne et ne se concrétisera qu’au tout début des années 2000. Réalisatrice de la comédie À nous quatre, Nancy Meyers hérite du film dont elle sent le fort potentiel mais qu’elle tient à se réapproprier. Sa première tâche consiste donc à revoir de fond en comble le scénario pour l’adapter à sa propre sensibilité, même si ce travail d’auteur reste officieux. Et c’est sous cette forme définitive que le script atterrit entre les mains de Mel Gibson et Helen Hunt, interprètes idéaux de deux créatifs publicitaires que tout sépare : le séducteur phallocentrique Nick Marshall et l’ambitieuse working girl Darcy Maguire.

Macho congénital, Nick Marshall a tout de même des circonstances atténuantes. Fils d’une showgirl de Las Vegas, privé de modèle masculin stable, notre homme s’est construit une image très stéréotypée de la femme. L’une de ses blagues préférées ? « Quelle est la différence entre ta femme et ton boulot ? Après dix ans, ton boulot te pompe encore ! » Voilà qui situe assez bien le personnage. Aujourd’hui, c’est le cadre d’une agence de pub visant ardemment le poste de directeur de création. Nick a eu son heure de gloire, concoctant des campagnes efficaces et fort rémunératrices. Mais les mœurs ont évolué, et sa tendance à vouloir objectifier les femmes pour vendre des produits n’est plus dans l’air du temps. Incapable de satisfaire les désirs et les attentes de la clientèle féminine, Nick risque de se retrouver sur la touche. De fait, le poste qu’il convoitait tant est attribué à une consœur, Darcy Maguire. Déstabilisé par ce retournement de situation, Nick s’enivre un soir chez lui, essaie des articles féminins dans l’espoir de comprendre la psyché des consommatrices et s’électrocute accidentellement. Le lendemain, il découvre avec stupeur que cet accident la métamorphosé. Il est désormais capable d’entendre distinctement les pensées de toutes les femmes qu’il croise…

La panique, l’acceptation et le renoncement

Ingénieux, le concept du film permet de transcender les lieux communs de la comédie romantique traditionnelle. Le surnaturel ouvre en effet des portes passionnantes sur le thème des différences séculaires entre le raisonnement des hommes et celui des femmes. Impeccable dans le rôle de ce publicitaire en passe de devenir obsolète, Mel Gibson explore à fond un potentiel comique qu’il n’avait jusqu’alors qu’effleuré (même si la saga L’Arme fatale lui permettait déjà de creuser habilement ce sillon). Grâce à Ce que veulent les femmes, il se révèle un formidable acteur de comédie et nous offre même un petit numéro musical extrêmement élégant sur le standard « I Won’t Dance » de Frank Sinatra. Au fil de ce récit initiatique, notre héros passe par trois étapes incontournables : la panique face à ce nouveau pouvoir, son acceptation et son exploitation au mépris de toute morale, et enfin son renoncement pour un retour à la normale à l’issue duquel il ressort changé et grandi. Malgré ce schéma attendu, le film surprend sans cesse et sait alterner adroitement l’humour et l’émotion, fermant au cours de son dernier acte toutes les portes ouvertes par son intrigue à tiroirs. Si la mise en scène de Nancy Meyers reste très discrète, laissant généralement les acteurs faire leur numéro sans entraver leurs performances, quelques effets de style intéressants affleurent lorsque la dramaturgie s’y prête, comme dans cette séquence où le héros découvre les pensées assassines de sa secrétaire (le montage nerveux alterne des plans de plus en plus courts des deux visages). Salué par le public et la critique, Ce que veulent les femmes sera l’un des derniers grands rôles de Mel Gibson, la suite de sa carrière perdant peu à peu de son éclat.

 

© Gilles Penso


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