BARBARE (2022)

Pour les besoins d’un entretien d’embauche, une jeune femme loue une maison pour la nuit. Mais les lieux sont déjà occupés…

BARBARIAN

 

2022 – USA

 

Réalisé par Zach Cregger

 

Avec Georgina Campbell, Bill Skarsgård, Justin Long, Matthew Patrick Davis, Richard Brake, Kurt Braunohler, Jaymes Butler, J.R. Esposito, Kate Bosworth

 

THEMA TUEURS I FREAKS

Comme beaucoup de films, Barbare s’apprécie d’autant plus qu’on en sait le moins possible sur ce qu’il raconte et sur les péripéties qui découlent de sa situation initiale. Rien ne sera donc révélé ici de l’intrigue, si ce n’est son point de départ. Le processus créatif qui a conduit à l’écriture du scénario ne manque pas d’intérêt. Le scénariste/réalisateur/acteur Zach Cregger s’est d’abord laissé inspirer par le livre « The Gift of Fear » de Gavin de Becker, dont le sous-titre « Signaux de survie qui nous protègent contre la violence » s’avère très éloquent. Cet essai entend indiquer aux lecteurs comment percevoir les indices annonciateurs de danger avant qu’il ne soit trop tard. C’est évidemment une manne pour un scénariste. En se laissant guider par son instinct, Cregger écrit le script d’un court-métrage dans lequel une femme fait face à un inconnu et dialogue avec lui, ignorant une série croissante de signes laissant indiquer qu’elle aurait toutes les raisons de se méfier de son interlocuteur. Pris au jeu, Cregger développe davantage son récit et le rallonge. Le titre de travail, Barbarian, deviendra définitif. Et ce sera le tout premier long-métrage solo de son auteur, après les comédies Miss Mars et The Civil War on Drugs qu’il co-dirigea avec Trevor Moore.

Le point de départ du film est le suivant : Tess Marshall (Georgina Campbell) vient passer un entretien d’embauche à Detroit. Son déplacement nécessite qu’elle passe la nuit dans la région. Elle réserve donc sur Airb’n B une maison dans le quartier résidentiel de Brightmoor. Mais en arrivant tard dans la soirée, Tess découvre qu’un homme occupe déjà les lieux. Il s’agit de Keith (Bill Skarsgård), qui prétend avoir lui aussi réservé la maison sur le même site et pour la même date. Nous n’en dirons pas plus. Même s’il n’est crédité nulle part au générique du film, Jordan Peele, qui est un bon ami de Zach Cregger, l’aurait aidé officieusement à affiner son scénario et à peaufiner son montage. La préoccupation majeure de Cregger restait de surprendre sans cesse ses spectateurs. Dans ce domaine, force est de reconnaître que la réussite est totale, les deux influences que le cinéaste cite en marge de son film étant David Fincher et Sam Raimi. Lorsqu’on voit Barbare jusqu’au bout, on comprend pourquoi.

Le sous-sol de la peur

Barbare nous saisit d’emblée par la finesse de son interprétation et la minutie de sa mise en scène. Avec une précision d’orfèvre, Cregger cisèle son cadre, sa lumière, sa bande son, jouant en virtuose avec l’attente des spectateurs. « Rupture » semble être son mot d’ordre, surtout à mi-parcours du film. Car l’intrigue ne cesse de rebondir là où on ne l’attend pas, s’amusant avec les lieux communs du genre pour mieux les détourner, laissant croire au public qu’il va pouvoir deviner les événements à venir pour mieux l’emmener ailleurs. Si l’humour s’invite de manière explicite au cours de la seconde partie, le sentiment de peur ne s’éloigne jamais totalement, et c’est ce fragile équilibre qui s’installe au cours du dernier acte, favorisant le surgissement de nouveaux protagonistes qui permettent de faire bifurquer sans cesse l’histoire dans des recoins inattendus. Hélas, le climax oublie toute mesure pour se laisser aller aux excès du Grand-Guignol, gâchant un peu la subtilité des effets déployés jusqu’alors. Il n’en demeure pas moins que le visionnage de Barbare reste une expérience fascinante. Succès surprise au box-office, le film rapportera plus de 43 millions de dollars dans le monde (pour un budget de 4,5 millions de dollars) avant d’atterrir sur les plateformes de streaming.

 

© Gilles Penso


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