HELLRAISER (2022)

La saga imaginée par Clive Barker renaît de ses cendres sous forme d’une réadaptation surprenante et audacieuse…

HELLRAISER

 

2022 – USA

 

Réalisé par David Bruckner

 

Avec Odessa A’zion, Jamie Clayton, Adam Faison, Drew Starkey, Brandon Flynn, Aoife Hinds, Jason Liles, Yinka Olorunnife, Selina Lo, Zachary Hing, Kit Clarke

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS I SAGA HELLRAISER

À partir de son quatrième opus, la franchise Hellraiser s’est mise à dégringoler lentement mais sûrement jusqu’à ne plus présenter aucun rapport avec la mythologie créée par Clive Barker. Pour redonner à cette saga un éclat depuis longtemps terni, l’idée d’un remake se formula dès l’automne 2007, les deux réalisateurs pressentis étant alors Alexandre Bustillo et Julien Maury (À l’intérieur, Livide). « Nous avons voyagé à Los Angeles pour rencontrer Clive Barker en personne, qui nous a immédiatement soutenus », raconte Bustillo. « Il nous a fait savoir qu’il aimait la direction que nous voulions donner à la franchise, et qu’il était prêt à nous aider pour réinventer visuellement le personnage de Pinhead. » Mais en lisant le scénario, les frères Weinstein sont rebutés par l’aspect radical et malsain que s’apprête à prendre le film. « Petit à petit, nous avons compris que l’ambition des producteurs était tout simplement de faire un slasher dans lequel des teenagers étaient victimes de Pinhead », poursuit Bustillo. « Nous avons rapidement déchanté. » (1) Exit donc les duettistes français. Le projet patine quelques années, cédant provisoirement la place à un anecdotique Hellraiser Révélations n’existant que pour pouvoir sécuriser la continuité des droits de la franchise auprès des producteurs, puis redémarre officiellement en 2019 à la suite du succès de l’Halloween de David Gordon Green. C’est finalement David Bruckner (réalisateur de The Signal, Le Rituel et La Proie d’une ombre) qui se retrouve à la tête du film.

S’il est conçu comme une nouvelle adaptation du roman « The Hellbound Heart » de Clive Barker, le scénario de Ben Collins et Luke Piotrowski, d’après une histoire qu’ils ont coécrite avec David S. Goyer, ne s’appréhende pas comme un remake du premier Hellraiser. Les personnages et les péripéties diffèrent. Quant à Pinhead, il s’est féminisé, prenant désormais les traits de Jamie Clayton. Ce parti pris inattendu s’approche des intentions du texte original, qui décrivait le fameux Cénobite à tête d’épingles comme un être asexué aux attributs féminins. Doug Bradley lui-même, interprète historique du personnage, se fendra d’une déclaration très encourageante à ce sujet, vantant sans retenue les mérites du nouveau Pinhead et de son look à la fois « dérangeant et sexy ». C’est en découvrant une étrange boite en forme de puzzle mécanique, au cours d’un cambriolage organisé par son petit-ami Trevor (Drew Starkey), que la jeune toxicomane Riley (Odessa A’zion) va déchaîner les forces du mal. En modifiant la configuration du mystérieux objet, elle provoque la venue des monstrueux Cénobites, lesquels exigent immédiatement plusieurs sacrifices humains. Dès lors le cauchemar semble ne plus pouvoir s’arrêter…

Sang neuf

Malgré ses maladresses, ses imperfections et son évident manque de budget, le tout premier Hellraiser de Clive Barker possédait une flamboyance, une démesure et un grain de folie primitif qui font défaut au film de David Bruckner, lequel se prive au passage de l’érotisme déviant et des jeux de séduction malsains présents à la fois dans le livre et dans son adaptation de 1987. Pour autant, cette relecture possède beaucoup d’attraits et se positionne aisément comme l’un des meilleurs volets d’une franchise ayant sombré depuis trop longtemps dans le grand n’importe quoi. La mise en scène soignée, l’atmosphère trouble, l’approche réaliste et sociale, la réinvention visuelle des Cénobites et le soin tout particulier apporté aux effets gore (mués en véritables œuvres d’art douloureuses et sanglantes) emportent assez rapidement l’adhésion. Certes, on aurait préféré une actrice principale plus charismatique, des rebondissements moins téléphonés et une approche plus baroque de la bande originale (qui se contente ici de citer sans éclat les thèmes somptueux de Christopher Young). Mais voilà une manière tout de même intéressante de redonner un peu de sang neuf à la saga Hellraiser et d’ouvrir la voie vers une réinvention prometteuse de cette mythologie fascinante.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en février 2011

 

© Gilles Penso


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