LE CALENDRIER (2021)

Une jeune femme fait l’acquisition d’un vieux calendrier de l’avent en bois dont chaque case renferme un secret terrifiant…

LE CALENDRIER

 

2021 – FRANCE / BELGIQUE

 

Réalisé par Patrick Ridremont

 

Avec Eugénie Derouand, Honorine Magnier, Clément Olivieri, Janis Abrikh, Cyril Garnier, Vladimir Perrin, Fabien Jegoudez, Jérôme Paquatte-Fremy

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS

Faire basculer la période festive de Noël dans l’horreur est une tradition connue dans le cinéma de genre, surtout depuis que les années 80 se sont amusées à ensanglanter les écrans avec des films tels que Black Christmas, Christmas Evil, Douce nuit sanglante nuit ou Don’t open until Christmas, pour n’en citer qu’une poignée. Mais l’un des éléments clés de cette imagerie gentiment sirupeuse avait jusqu’alors échappé aux radars des cinéastes amateurs de frissons : le calendrier de l’avent. 24 petites fenêtres s’ouvrant sur des surprises généralement sucrées, voilà autant de possibilités de faire fonctionner l’imagination des scénaristes pour transformer les promesses en cauchemars. Cette transgression d’une tradition germano-finlandaise qui semble remonter au 19ème siècle n’est pas l’œuvre d’un cinéaste anglo-saxon – une fois n’est pas coutume – mais d’un réalisateur, scénariste et acteur belge à qui nous devons la comédie dramatique Dead Main Talking mettant en scène François Berléand, son épouse de l’époque Virginie Efira et lui-même dans le rôle principal. Avec Le Calendrier, il change de registre et s’enfonce dans la brèche attrayante de la légende urbaine pour concocter un film d’épouvante surprenant s’appuyant sur les failles physiques et psychologiques de son personnage principal.

Eva (Eugénie Derouand) est une ancienne danseuse, mais un accident l’a brutalement rendue paraplégique. Désormais clouée sur un fauteuil roulant, elle travaille dans un cabinet d’assurance pour un patron détestable, s’est éloignée de son père frappé de sénilité qui vit avec une femme odieuse et cupide, essuie régulièrement des remarques condescendantes, bref le tableau n’est pas très reluisant. Pour l’heure, ses rayons de soleil sont son chien fidèle Marvin et sa meilleure amie Sophie (Honorine Magnier). De retour d’un voyage en Allemagne, cette dernière a ramené à Eva un cadeau très spécial : un vieux calendrier de l’Avent en bois déniché par hasard sur un marché de Noël. Cet objet mécanique étrange, qui n’aurait pas dépareillé dans un film de Guillermo del Toro, annonce d’emblée trois règles immuables écrites en allemand. Règle numéro 1 : si on avale l’un des bonbons que contient le calendrier, il faut tous les avaler. Règle numéro 2 : il est impératif de respecter toutes les règles jusqu’à l’ouverture de la dernière fenêtre. Règle numéro 3 : il ne faut pas le jeter. La sanction en cas de non-respect des règles est simple : c’est la mort.

La 24ème porte

L’entame du Calendrier est très intrigante, dessinant rapidement les contours d’un motif classique du cinéma et de la littérature fantastique : le pacte avec le diable. En acceptant de respecter les règles de cette relique d’un autre âge dont les mécanismes n’en finissent pas de révéler leurs secrets enfouis, Eva découvre que tous ses souhaits, y compris les plus intimes ou les plus inavouables, finissent par s’exaucer. Mais de tels prodiges n’existent évidemment pas sans contreparties. Pour aller au bout de ce jeu malsain s’égrenant progressivement au fil de chaque journée du mois de décembre jusqu’au 24 fatidique, Eva sait qu’elle devra accepter des sacrifices de plus en plus difficiles. Ce dispositif narratif n’est pas sans évoquer celui de 13 jeux de mort (et de son remake 13 Sins) qui lui aussi faisait lentement glisser son protagoniste sur la pente d’une dangereuse descente aux enfers. La présence surnaturelle d’un être démoniaque répondant au nom sommaire de « Ich » (« Moi » en allemand) est d’emblée assumée par une série de plans furtifs révélant progressivement sa morphologie inquiétante qui semble tout droit échappée de Silent Hill. Reste à savoir si ce monstre est réel ou s’il flotte dans l’esprit fébrile d’une héroïne campée avec beaucoup de justesse et de sensibilité par Eugénie Derouand (vue dans la série Paris Police 1900). La solidité des acteurs est justement l’un des points forts du film, qui s’appuie également sur une mise en scène très soignée (jouant habilement sur ses cadres, ses focales, ses lumières et ses effets visuels discrets pour susciter le malaise). Le Calendrier est donc une variante très recommandable sur le thème protéïforme du Noël sanglant.

 

© Gilles Penso


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