COOL WORLD (1992)

Brad Pitt tient la vedette dans cette version adulte de Roger Rabbit concoctée par le spécialiste de l'animation Ralph Bakshi

COOL WORLD

1992 – USA

Réalisé par Ralph Bakshi

Avec Kim Basinger, Gabriel Byrne, Brad Pitt, William Frankfather, Greg Collins, Jani Brenn, Joey Carmen, Michael David

THEMA MONDES VIRTUELS ET PARALLELES

Malgré l’accueil tiède plusieurs de ses projets animés (Le Seigneur des Anneaux, Tygra la glace et le feu), Ralph Bakshi est un cinéaste intéressant dont les expérimentations dépassent généralement le cadre habituel des films de studio. D’aucuns le considèrent même comme une figure incontournable du cinéma d’animation. Avec Cool World, il eut l’idée initiale d’un film pour adultes (généreux en scènes horrifiques et érotiques) mêlant acteurs réels et toons. L’actrice Traci Lords, spécialisée dans le cinéma X, était d’ailleurs pressentie pour le rôle principal. Mais le projet changea de cap en cours de route, entraînant un assagissement de son concept de base.

Tout commence en 1945. A peine rentré du front, le lieutenant Frank Harris (Brad Pitt) est victime d’un accident qui coûte la vie à sa mère. Alors que les premiers secours se rendent sur les lieux, Frank est enlevé par un personnage de bande dessinée qui l’attire dans son univers en deux dimensions. Et nous voilà transportés en 1992. Emprisonné pour avoir abattu l’amant de sa femme, le dessinateur Jack Deebs (Gabriel Byrne) est enfin libéré. Concepteur de la série « Cool World », il découvre que sa nouvelle existence prend un tour inattendu : à la moindre occasion, la réalité se désagrège pour le transporter dans l’univers fictif issu de son imagination. Un scientifique a en effet mis au point une machine capable de connecter ces deux mondes parallèles appartenant à des réalités bien à part. Deebs fait ainsi la connaissance de son personnage fétiche, la danseuse Holli Would (à qui Kim Basinger prête sa voix langoureuse), une très sensuelle créature de papier dont le seul but est de devenir à tout prix un être de chair et de sang en trois dimensions. Son chemin croise également celui du lieutenant Harris, prisonnier de « Cool World ».

De grandes ambitions mais un résultat décevant

Voici donc une variante originale sur les thèmes développés par Roger Rabbit. Mais Ralph Bakshi a bâclé les deux éléments les plus importants de son film : le scénario et les effets spéciaux. L’histoire, en effet, repose sur la juxtaposition de deux mondes antithétiques, celui des humains (noïdes) et celui des dessinés (toons). Mais les transitions d’un monde à l’autre, les transformations de toons en noïdes, ou vice-versa, et les possibilités de superposition des deux univers obéissent tous à des lois complètement évasives qui semblent improvisées au fur et à mesure. Du coup, on n’y croit pas une seconde. Et la technique, elle non plus, n’est pas à la hauteur. Les passages en dessin animé pur, apparemment très inspirés de l’univers déjanté de Crumb, sont esthétiquement très pauvres. Mais ce sont les interactions entre toons et noïdes qui laissent le plus à désirer : les dessins tremblotent dès qu’ils sont censés toucher les acteurs réels, des liserés bleutés apparaissent régulièrement autour des personnages, et les ombres et reliefs (éléments clefs de la réussite technique de Roger Rabbit) sont totalement gommés chez les toons. Sans parler des décors plats en carton placés parfois derrière les acteurs en guise d’environnement de dessin animé. L’échec narratif se double donc d’un échec visuel. C’est vraiment dommage, car l’originalité de cette tentative était louable, d’autant que les trois comédiens vedettes étaient, eux, le fruit d’un choix judicieux.

 

© Gilles Penso

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