LE PIRE ENNEMI DE SPIDER-MAN

Le pire ennemi de Spider-Man n’est ni le Bouffon Vert, ni le Docteur Octopus, ni même Venom. Il s’agit d’une certaine
Geneviève Coulomb. Vous n’avez sans doute jamais
entendu parler de cette mystérieuse super-vilaine. Pourtant, vous avez
probablement subi l’ampleur de ses forfaits si vous vous
êtes plongé dans les rééditions de l’intégrale des aventures de
l’homme-araignée publiées depuis une décennie chez Panini France.
entendu parler de cette mystérieuse super-vilaine. Pourtant, vous avez
probablement subi l’ampleur de ses forfaits si vous vous
êtes plongé dans les rééditions de l’intégrale des aventures de
l’homme-araignée publiées depuis une décennie chez Panini France.
entendu parler de cette mystérieuse super-vilaine. Pourtant, vous avez
probablement subi l’ampleur de ses forfaits si vous vous
êtes plongé dans les rééditions de l’intégrale des aventures de
l’homme-araignée publiées depuis une décennie chez Panini France.
entendu parler de cette mystérieuse super-vilaine. Pourtant, vous avez
probablement subi l’ampleur de ses forfaits si vous vous
êtes plongé dans les rééditions de l’intégrale des aventures de
l’homme-araignée publiées depuis une décennie chez Panini France.
 
L’initiative de ces rééditions est
une bénédiction pour tous les spiderphiles qui souhaitent redécouvrir
depuis les origines (donc depuis le fameux Amazing Fantasy
n°15 de 1962) les aventures de Peter Parker et de son alter-ego
rouge et bleu. Jusqu’alors, ces histoires n’étaient disponibles en
français que dans les numéros de Strange ou de Fantask, publiés
chez feu les éditions Lug et devenus aujourd’hui des pièces de
collection aux prix parfois exorbitants. Actuellement, Panini en arrive
aux récits du début des années 80 et a donc déjà brassé
vingt années d’exploits arachnéens. Les collectionneurs ne peuvent
que crier de joie, d’autant que certaines de ces histoires étaient à
l’époque censurées chez Lug, voire tronquées ou publiées
dans le désordre. Alors où le bât blesse-t-il ?
 
Certes, la qualité d’impression, la
restitution des couleurs et l’encrage laissent parfois à désirer, si
l’on compare ces VF avec les versions originales. Mais le
plus gros problème réside ailleurs. Chargée de la traduction
française de tous les textes écrits par Stan Lee puis par les
scénaristes qui lui succédèrent, Geneviève Coulomb a décidé d’adopter un
style pour le moins étrange qui surprend dès les premières cases. De
l’argot incompréhensible aux contresens fréquents en passant par les
erreurs de syntaxe, l’orthographe aléatoire, les
grossièretés anachroniques, les interjections enfantines, les
expressions imaginaires, les insultes excentriques ou les traits
d’humour vulgaires, c’est un véritable festival d’absurdités qui ne
laisse au lecteur aucun répit. Du point de vue de l’humour
involontaire, l’effet est réussi. Mais pour qui souhaite (re)découvrir
les mythiques épisodes de la saga “Amazing Spider-Man” dans la
langue de Molière, c’est une véritable épreuve de force.

Sous la plume de GC, le brave Peter
Parker, jeune étudiant poli et sympathique, premier de la classe et
chouchou des
professeurs, devient impulsif et grossier. Lorsque Flash Thompson le
bouscule, il rétorque : “Gaffe, espèce de connard !”. Le mot “connard”
revient d’ailleurs souvent dans la traduction des
épisodes, reflet d’une vulgarité pourtant totalement absente des
écrits de Stan Lee. Dans les propos de Flash, Coulomb utilise très
souvent le mot “polar” (sans doute veut-elle dire “polard”,
vieille expression qualifiant un étudiant très sérieux) et traduit
ici “puny Parker” (“chétif Parker”) par “vermine”.

Dans
la case suivante, Flash disait en V.O. “Don’t make a federal case out
of it”, autrement dit “on ne va pas en faire une
affaire d’état”. Mais Coulomb aime faire dans la gaudriole. Elle
nous propose donc : “on va pas en péter une pendule” !!! Et lorsque
Flash traite Parker de “weakling” (“faible”), Coulomb choisit
le mot “rachtèque”, que ne mentionne aucun dictionnaire, et qui
semble être une contraction fantaisiste du mot “rachitique”.
 

On
continue dans la bonne humeur avec une réplique de haut vol lancée par
notre ami Spider-Man : “Nom de… !! Le roi des cons
est pas mon cousin !” Ici, la vulgarité le dispute à la stupidité,
et transforme notre bon vieux monte-en-l’air, d’habitude si spirituel,
en lourdaud au langage de charretier. Que disait-il en
V.O. ? “Holy smoke ! I must be the world’s prize chump!”,
c’est-à-dire “Bon sang ! Je suis le roi des idiots !” Pas assez fun pour
Funky Geneviève qui a cru bon d’y ajouter sa patte
inimitable…

Dans
un registre voisin, GC décide de s’ériger en émule de Marcel Pagnol dont elle paraphrase n’importe comment l’une des
répliques culte pour la greffer gratuitement aux dialogues de
Spider-Man. Ce qui nous donne (tenez-vous bien) : “Le jour où on a fait
danser les c…, j’étais pas à l’orchestre !”. Pas mal, non ?
“L’araignée radioactive m’a filé sa bêtise” poursuit Geneviève. Nous
serions tentés de lui renvoyer le compliment.
 

Dans
le domaine des interjections préférées de GC, deux reviennent
systématiquement, au moins une fois toutes les trois ou
quatre pages : “Calamitas !” (qui ne veut évidemment rien dire, à
moins que les personnage ne se mettent soudain à parler en latin) et
surtout “Crotte !” Chaque fois que Spider-Man est en
difficulté, il prononce ce joli mot digne de la petite section de
maternelle, comme ici face à l’homme-sable. Il y a plus de crottes dans
l’intégrale Spider-Man que sur les trottoirs de Paris. Un
bon coup de balai s’impose…
 

Il
y a aussi les répliques totalement incompréhensibles, du type :
“j’avais des peaux de sauc’ devant les yeux”. Là, toutes
les suppositions sont permises. S’agit-il de peaux de saucisson ? De
saucisse ? Allez savoir ! Les expressions imaginaires, les exclamations
enfantines et les insultes surannées sont légion chez
GC : “crâne d’alouf, tronche de piaf, duchnok, dugenou, chaud
dessous, bonjour l’angoisse, c’est peau de balle, petitou, tintin, des
clopes, depuis lulure”, pour n’en citer qu’une poignée. Sans
oublier l’innénarrable “Chmilbliz” qui lui a probablement été
inspiré par le Schmilblik de Coluche et Guy Lux et qui, comme tout le
reste, tombe dans les dialogues comme un cheveu gras dans la
soupe.
 

Là,
nous voila pantois. “Je comptais t’enfourner par cette lucarne avant
que tu me sèmer du poivre !” s’écrie Spider-Man en
sautant sur le Bouffon Vert. Combiner dans une même réplique une
faute d’orthographe, une faute d’accord, une expression inventée de
toutes pièces (“semer du poivre” ???) et un verbe au sens
douteux (“enfourner” par une lucarne ???), ça relève du grand art !
 
Quand on sait que ces quelques
exemples, glanés au fil des trois premiers tomes de l’intégrale (qui en
compte aujourd’hui 25) reflètent assez précisément la nature
des textes qui nous sont assénés épisode après épisode, on ne peut

s’empêcher de soupirer de lassitude et d’incrédulité. Un tel niveau
d’incompétence laisse rêveur, surtout lorsqu’on connaît la
valeur historique et culturelle d’une telle réédition.
 
Mais bon sang, que Geneviève Coulomb

change de métier et que Panini réédite ces aventures avec de vraies
traductions dignes de ce nom !
© Gilles Penso  
VOIR AUSSI (sur le même thème) :
LES TRADUCTIONS CALAMITEUSES DE SPIDER-MAN
CACHEZ CETTE QUEUE QUE JE NE SAURAIS VOIR !