SILENT HILL (2006)

Cinq ans après Le Pacte des loups, Christophe Gans signait cette adaptation très soignée du célèbre jeu vidéo de Konami

SILENT HILL

2006 – FRANCE / CANADA

Réalisé par Christophe Gans

Avec Radha Mitchell, Sean Bean, Laurie Holden, Deborah Kara Unger, Jodelle Ferland, Tanya Allen, Kim Coates, Alice Krige

THEMA DIABLE ET DEMONS

Alors qu’il finalisait Le Pacte des loups, Christophe Gans annonçait maints projets fort alléchants, dont les moindres n’étaient pas des adaptations de « 20 000 Lieues sous les Mers » ou de la bande dessinée « Rahan ». Face à la difficulté liée au montage financier de tels films, il se rabattit sur la transposition sur grand écran du jeu culte « Silent Hill », qui présentait le double intérêt de proposer un univers horrifique original et de s’éloigner du traditionnel schéma « shoot’em up ». Epaulé par le scénariste Roger Avary, le cinéaste s’est efforcé de rester le plus fidèle possible au jeu de Konami, avec toutefois une entorse importante : le changement de sexe du personnage principal. L’héroïne de Silent Hill est Rose Da Silva, une jeune mère désemparée face aux crises de somnambulisme de plus en plus fréquentes de sa fille adoptive Sharon, évoquant dans son sommeil la ville abandonnée de Silent Hill. Décidée à comprendre le mal dont souffre son enfant, Rose passe outre l’avis de son époux Christopher et emmène Sharon dans la ville en question. La bourgade est à l’abandon depuis des années, une pluie de cendres y flotte perpétuellement… et soudain Sharon disparaît. Rose se lance à sa poursuite et découvre un univers terrifiant dans lequel, dès que paraissent les ténèbres, surgissent d’abominables créatures qui semblent liées à une ancestrale malédiction.

Œuvre résolument plus mature que Crying Freeman et Le Pacte des loupsSilent Hill n’a rien du patchwork de références cinéphiliques et s’inscrit dans un univers cohérent et maîtrisé. Il faut reconnaître que Gans parvient à construire une atmosphère des plus étranges, plongeant à plusieurs reprises dans un surréalisme total que ne peut décemment renier le créateur du jeu, Akira Yamaoka, lui-même très inspiré par Francis Bacon. Visuellement, le film est donc une indéniable réussite, mais le réalisateur se laisse plusieurs fois piéger par sa propre virtuosité, la recherche picturale l’emportant trop souvent sur l’émotion. Témoin cette séquence où Rose, croyant enfin retrouver sa fillette, avance lentement vers elle. Au lieu de s’approcher des visages pour créer un lien intime et renforcer l’empathie, la caméra se met à virevolter loin des personnages, avec beaucoup de grâce, certes, mais sans la moindre justification.

Surréalisme horrifique

L’autre travers du film est la nature excessive des manifestations surnaturelles qu’il met en scène. Le public est prêt à s’effrayer face à une dizaine de gros cafards rampant sur les héros. Mais des centaines de milliers de cancrelats grands comme des chats sont trop peu réalistes pour convaincre. Du coup, lorsque l’horreur est plus tangible, elle fonctionne mieux. Notamment lorsque « Pyramide Rouge » menace de transpercer les protagonistes à l’aide d’une lame colossale, ou lorsqu’apparaît sur le bord de la route un épouvantable homme difforme qui semble prisonnier de son propre corps. Dommage que l’une des plus belles idées du scénario – la co-existence simultanée de quatre mondes parallèles dans le même espace – ne soit qu’évasivement évoquée par le scénario. Restent quelques très belles séquences, et une poignée d’effets gore nous rappelant que Christophe Gans côtoya jadis Brian Yuzna à l’occasion de Necronomicon.
 

© Gilles Penso

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