VOLTE/FACE (1997)

John Woo réalise le film d'action ultime en recyclant le postulat des Yeux sans visage pour offrir à John Travolta et Nicolas Cage deux de leurs meilleurs rôles

FACE OFF

1997 – USA

Réalisé par John Woo

Avec John Travolta, Nicolas Cage, Joan Allen, Gina Gershon, Nick Cassavetes, Alessandro Nivola, Dominique Swain, Colm Feore

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

Le passage de John Woo sous le giron hollywoodien n’avait été jusqu’alors pas des plus concluants, Chasse à l’homme et Broken Arrow n’étant que d’anonymes œuvrettes d’action sans personnalité. Mais avec Volte/Face, l’auteur de The Killer place la barre très haut, réalisant probablement l’un de ses meilleurs films, toutes nationalités confondues. Le scénario y mêle action, polar et science-fiction en s’inspirant en partie des  Yeux sans visage  de Georges Franju. Mais contrairement aux intentions initiales du studio, qui envisageait Volte/Face comme un film d’anticipation, Woo décide de situer le film dans un contexte contemporain afin de renforcer l’identification du public à ses protagonistes.

Directeur d’une unité anti-terroriste, Sean Archer (John Travolta) recherche sans relâche Castor Troy (Nicolas Cage), un criminel responsable de la mort de son fils six ans plus tôt. Il parvient à l’arrêter mais apprend que Troy a caché une bombe au Palais des Congrès de Los Angeles. Seul le frère de Troy peut la désamorcer et, pour l’approcher, Archer se fait greffer la figure de Troy grâce à une technologie chirurgicale révolutionnaire. Entre-temps, Troy sort de son coma et, sous la menace, oblige le chirurgien responsable de l’opération à le doter du visage d’Archer. Le vaudeville musclé peut alors commencer… A l’apogée de son art, Woo, profite de ce récit vertigineux pour enchaîner des séquences d’action proprement ahurissantes, de la prise en chasse de l’avion en pleine aérogare (tournée en live sans recours aux fond verts initialement prévus) jusqu’à la poursuite finale en hors-bord, surclassant allègrement celles de Vivre et laisser mourir et Indiana Jones et la dernière croisade (et imaginée à l’origine pour le climax de Chasse à l’homme), en passant par l’étourdissante fusillade du repaire des méchants.

L'innocence perdue, la trahison et le sacrifice

Mais si Volte/Face n’était qu’un catalogue de scènes mouvementées, aussi maîtrisées soient-elles, et s’il se contentait d’être le véhicule du génie pyrotechnique de son auteur, il n’aurait pas autant marqué les mémoires. Or le film vaut surtout pour la direction de ses comédiens, domaine dans lequel John Woo a trop souvent été sous-estimé. Car le scénario audacieux de Volte/Face permet une performance d’acteurs étonnante. Ce n’est pas tous les jours qu’on a l’occasion de voir deux interprètes aussi dissemblables que John Travolta et Nicolas Cage donner chacun à tour de rôle leur propre version de deux mêmes personnages. Il est d’ailleurs intéressant de savoir que Sylvester Stallone et Arnold Schwarzenegger furent un temps envisagés pour tenir les deux rôles principaux. Et si Volte/Face se hisse au rang de chef d’œuvre du genre, c’est que Woo a pu y développer en toute liberté la plupart des thématiques qui lui sont chères : l’innocence perdue, la trahison, le sacrifice, la quête de justice et de paix intérieure… D’où ce happy end que d’aucuns jugèrent dégoulinant de bons sentiments, mais qui n’est en réalité que l’issue logique du parcours initiatique éprouvant de son héros. Volte/Face aura également permis au public de découvrir l’immense talent du compositeur John Powell, alors encore sous l’influence du travail de Hans Zimmer.

 

© Gilles Penso 

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