THE HUMAN CENTIPEDE (2009)

Un ancien chirurgien à la retraite kidnappe trois cobayes qu’il veut coudre l’un à l’autre pour créer un mille-pattes humains !

THE HUMAN CENTIPEDE (FIRST SEQUENCE)

 

2009 – HOLLANDE

 

Réalisé par Tom Six

 

Avec Dieter Laser, Ashley C. Williams, Ashlynn Yennie, Akihiro Kitamura, Andreas Leupold, Peter Blankenstein, Bernd Kostrau

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE I SAGA THE HUMAN CENTIPEDE

« Un pédophile mériterait d’avoir la bouche cousue à l’anus d’un chauffeur routier obèse et flatulent. » C’est cette idée saugrenue, née d’une blague d’un goût douteux, qui trotte un jour dans la tête du réalisateur Tom Six et lui met le pied à l’étrier pour l’écriture et la réalisation de The Human Centipede. Plusieurs films alimentent son imagination pendant les phases d’élaboration du scénario, notamment Salo ou les 120 jours de Sodome de Pasolini, les œuvres perturbantes de Takashi Miike, les premiers longs-métrages de David Cronenberg et même certains films de David Lynch. À cette source d’inspiration cinéphilique vient se greffer une horreur bien réelle, celle des camps de la mort des nazis. Ce patchwork d’influences disparates donne naissance à un scénario étrange et malsain dont Tom Six ne révèle pas la teneur exacte lorsqu’il se met en quête d’investisseurs, précisant simplement qu’il s’agira d’un film d’horreur à portée internationale concernant un savant fou qui veut coudre entre eux plusieurs cobayes humains. En revanche, au moment du casting, le cinéaste se montre plus explicite, affichant devant les comédiennes postulantes un dessin montrant précisément le mille-pattes humain qu’il a en tête. Plusieurs actrices offusquées prennent aussitôt la poudre d’escampette. Les deux heureuses élues, Ashley C. Williams et Ashlynn Yennie, seront finalement dénichées à New York, tandis que leur partenaire masculin Akihiro Kitamura passera une audition depuis Los Angeles via Skype. Quant au médecin dément, il est incarné par l’acteur allemand Dieter Laser que Tom Six avait en tête dès le début des préparatifs du film.

Trompeur, le prologue de The Human Centipede accumule volontairement les lieux communs du slasher traditionnel pour mieux prendre ses spectateurs par surprise. Deux jolies touristes américaines qui voyagent en Europe tombent en panne dans les bois au milieu de la nuit. En quête de refuge, elles trouvent une villa isolée et y passent la nuit. Lorsqu’elles se réveillent le lendemain, c’est pour découvrir qu’elles sont piégées dans le sous-sol de la villa transformé en hôpital de fortune, en compagnie d’un autre prisonnier nommé Katsuro. Leur geôlier est Josef Heiter, un chirurgien allemand à la retraite spécialisé dans la séparation de jumeaux siamois (et dont le nom et le comportement s’inspirent de toute évidence de véritables médecins nazis ayant perpétré d’innommables expériences pendant la guerre). Le projet d’Heiter est autant délirant que terrifiant. Il compte assembler le corps de ses trois « patients » pour créer une créature unique, en reliant leurs organismes par le système gastrique. Il sera ainsi le premier homme à avoir créé un mille-pattes humain ! Et tandis que les captifs à qui il décrit de manière très détaillée la future opération sont pétrifiés d’horreur, Heiter aiguise ses bistouris, tout heureux de pouvoir concrétiser un vieux fantasme…

Le charme discret de l’intestin

Le film repose donc sur un concept atroce et le « spectacle » serait absolument insoutenable si Tom Six nous montrait ouvertement ce dont il parle. Mais The Human Centipede préfère la suggestion à la démonstration, ne basculant jamais dans la démonstration gore ou sanglante. De fait, c’est surtout dans l’esprit des spectateurs que se développe l’abomination, bien plus qu’à l’écran. La situation finit même par sombrer dans le ridicule, un ridicule désespéré et en partie assumé par un métrage qui ne manque pas d’humour noir. Impressionnant, Dieter Laser est assurément la révélation du film, au cœur de quelques séquences de suspense assez éprouvante en fin de métrage. Le manque de moyens du film est manifeste. Six tourne avec les moyens du bord, dans des décors réels hollandais (alors que l’intrigue se déroule en Allemagne), s’équipant de matériel loué dans un hôpital local, dirigeant ses trois comédiens « cobayes » dans des conditions physiques difficiles (ils passent le plus clair du tournage à quatre pattes). Mais ce minimalisme joue en faveur de l’atmosphère austère et glaciale que construit le cinéaste. En toute logique, The Human Centipede a provoqué quelques réactions épidermiques auprès d’un grand nombre de spectateurs et de critiques. Vendu comme un film « 100% correct d’un point de vue médical », cet exercice de style volontairement choquant donnera naissance à deux séquelles.

 

© Gilles Penso

Partagez cet article