EMBRASSE-MOI, VAMPIRE (1988)

Nicolas Cage se laisse séduire par Jennifer Beals, qu’il soupçonne d’être un vampire, et bascule dans la folie la plus exubérante…

VAMPIRE’S KISS

 

1988 – USA

 

Réalisé par Robert Bierman

 

Avec Nicolas Cage, Maria Conchita Alonso, Jennifer Beals, Elizabeth Ashley, Kasi Lemmons, Bob Lujan

 

THEMA VAMPIRES

Écrit par Joseph Minon (à qui nous devons le scénario de After Hours) et réalisé par Robert Bierman (qui effectue là ses premiers pas de metteur en scène pour le cinéma), Embrasse-moi, vampire s’appuie sur un postulat très prometteur. Peter Loew (Nicolas Cage), un agent littéraire coureur de jupons, est persuadé que Rachel (Jennifer Beals), la jeune femme qu’il a ramenée chez lui un soir, est un vampire qui l’a mordu. Obsédé par cette idée, il finit par ne plus distinguer la réalité de l’illusion et se défoule en terrorisant Alva (Maria Conchita Alonso), l’une de ses secrétaires. Mais les choses ne s’arrangent pas et les crises empirent. Ses séances de psychanalyse avec le docteur Glaser (Elizabeth Ashley) n’apaisent pas non plus la situation. Et s’il était réellement en train de se transformer en vampire ? Autour de lui, la vie quotidienne se transforme en cauchemar et le sang va finir par couler. A la lecture de ce « pitch », on imagine des situations comiques en cascades, une progression dramatique allant crescendo, une balance constante entre l’épouvante et l’humour… Hélas, il n’y a rien de tout ça dans le film de Robert Bierman, qui se prive de tout le potentiel inhérent à son concept et qui, au lieu de faire rire, peur, voire les deux, se contente d’accumuler les séquences hystériques et absurdes sans se soucier un seul instant de cohérence et d’épaisseur dramatique.

Alors en début de carrière, Nicolas Cage surjoue à outrance, écarquille les yeux, pousse des hurlements toutes les trente secondes et adopte une démarche à la Quasimodo. Il faut bien admettre que l’acteur – comme toujours – donne de sa personne, détruisant pour de vrai la quasi-totalité du mobilier d’un appartement au risque de se blesser ou avalant face à la caméra un cafard bien réel (une référence aux agissements du Renfield de « Dracula » qu’il regretta plus tard). Cage citera souvent sa prestation dans Embrasse-moi, vampire comme sa préférée, alors que nous serions tentés de penser que c’est la pire ! De fait, ses intentions de jeu – imiter les mimiques de Max Schreck dans Nosferatu, adopter un faux accent pour que son personnage ait l’air faussement distingué en société – sont souvent incompréhensibles. Échappée de Flashdance et La Promise, Jennifer Beals inonde quant à elle l’écran de sa beauté envoûtante qui nous ferait presque croire, à nous aussi, qu’elle est un être surnaturel. Mais sa présence trop furtivement exploitée ajoute une pierre à l’édifice de la frustration qu’engendre le film de Bierman.

Cage en roue libre

En réalité, il est moins question de vampirisme que de folie dans ce film. La comédie fantastique promise prend vite les allures d’un drame pathétique mal fagoté, tournant principalement autour d’un patron atteint de démence qui ne cesse de tourmenter sa secrétaire. Et comme notre « héros » semble atteint de délire dès le début du film, que ses agissements demeurent parfaitement invraisemblables et qu’il n’y a aucun moyen de s’identifier à lui, le spectateur finit forcément par se désintéresser de l’intrigue. Reste une poignée de séquences propres à arracher quelques sourires, comme Nicolas Cage dormant sous son canapé qu’il a aménagé en cercueil de fortune, ou courant après des pigeons en s’affublant de dents de vampire en plastique. C’est peu, certes, mais suffisant pour les nombreux fans de la star de Sailor et Lula qui guettent avidement tous les excès d’un acteur connu pour ses coups de folie, ses débordements et ses fulgurances. Christian Bale lui-même avouera s’être inspiré de cette prestation délirante pour incarner le tueur d’American Psycho.

 

© Gilles Penso


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