STEVEN AVANT SPIELBERG

Moitié biographie romancée, moitié étude analytique, une déclaration d'amour au cinéma, à l'enfance et à l'imagination

Un livre de Gilles Penso

Éditeur Michel Lafon

Couverture Paul Shipper

Format 320 pages

Disponible depuis le 3 novembre 2022

 

Synopsis

Biographie romanesque d’un être résolument à part, Steven avant Spielberg vous fait découvrir l’enfant avant le cinéaste. Chapitre après chapitre, ses jeunes années s’y révèlent, portant déjà en germe tout ce qui fera de lui l’un des réalisateurs les plus populaires de tous les temps.

Publier un énième livre sur un des cinéastes les plus populaires et influents de ces cinquante dernières années est au choix un défi osé ou un coup d’épée dans l’eau. Tout n’a-t-il pas déjà été dit sur Steven Spielberg, le Wonder Boy hollywoodien ? Sa filmographie n’est-elle pas elle-même assez explicite quant à sa vision aussi fantastique qu’émerveillée du monde jusque dans ses zones d’ombre ? Combien de pages ont déjà été noircies pour expliquer de façon parfois intellectuellement paresseuse que La Liste de Schindler avait définitivement fait entrer le cinéaste dans l’âge adulte ? Et pourtant, pour le spectateur lambda comme pour le cinéphile connaissant son œuvre sur le bout des doigts, Spielberg est un réalisateur trop souvent pris pour acquis. Pour la génération X, la sortie de chacun de ses films a été vécue comme la visite d’un oncle fantasque rapportant de ses voyages des cadeaux merveilleux à des enfants en mal de rêves. À travers ses productions Amblin, il a renforcé son omniprésence et devint le maitre d’œuvre le plus influent du cinéma populaire des années 80. Artiste ou nabab ? Steven Spielberg est les deux à la fois mais Gilles Penso choisit de se focaliser sur le premier aspect, car l’affirmation qui suit vaut pour les deux hommes : son amour pour le médium cinéma remonte à sa plus tendre enfance, à un âge auquel on « croit », parce qu’on en a envie ou besoin sans même le savoir, et que les trivialités du monde concret ne sont que des obstacles encore hors de portée de vue sur notre chemin. Le but de Gilles Penso n’est donc pas de démystifier l’image de prophète du 7ème art qu’incarne son idole. Pas plus qu’il ne s’agit de lui bâtir une cathédrale car la mémoire cinéphile collective s’en est déjà chargée, ses nombreux fidèles prêchant la bonne parole en arborant souvent fièrement sur leur t-shirt les affiches de E.T., Les Dents de la mer et Jurassic Park. Et si Steven avant Spielberg se présente à priori comme une biographie romancée en mode Shakespeare in Love, on s’aperçoit très vite à sa lecture qu’il va aller au-delà d’un simple jeu de points à relier entre des évènements biographiques et leur écho à l’écran.

Gilles Penso n’a pas pu interviewer Steven Spielberg pour la préparation de son livre mais il a eu l’occasion de le rencontrer à plusieurs occasions au cours de sa carrière journalistique. Il sait toutefois que le manuscrit du chapitre introductif, traduit en anglais, a été déposé sur son bureau par son assistante. S’il l’a lu, qu’en a-t-il pensé, alors qu’il vient justement de réaliser dans le plus grand secret The Fabelmans (à sortir en France en Février 2023) qui se trouve être… une autobiographie romancée ? Toutefois, l’approche choisie par l’auteur ne consiste pas simplement à relater la vie de Spielberg de façon scolaire et linéaire. Fruit de recherches dignes d’un archéologue du 7ème art, Gilles Penso a lu et relu, vu et revu une quantité impressionnante d’articles, interviews, making of, et s’est remémoré ses rencontres passées avec des collaborateurs proches du papa d’E.T. afin d’éclairer les passages les plus personnels de sa vie, et s’imprégner de l’esprit qui pouvait animer le jeune Steven, ainsi que l’atmosphère familiale dans laquelle il a grandi. En résulte des reconstitutions littéraires de moments intimistes de la vie familiale des Spielberg, où la prédominance des parents Leah et Arnold et le traumatisme de leur divorce apportent un éclairage aussi sensible que pertinent à la compréhension de plusieurs œuvres-clés de leur progéniture. Et si certaines « scènes » seront déjà connues des cinéphiles, leur mise en perspective est ici inédite. Chaque chapitre débute ainsi par une partie romancée avant que la « voix » de l’auteur ne vienne mettre le récit en pause pour illustrer de ses méticuleuses analyses et interprétations les thématiques et motifs récurrents de la filmographie du cinéaste, en piochant dans sa riche filmographie, de ses premières armes télévisuelles jusqu’aux productions de sa société Amblin. Pour autant, les théories avancées ne sont jamais capillotractées, mais au contraire dûment argumentées. Saviez-vous par exemple que le prénom de Fievel dans le film d’animation éponyme produit par Spielberg en 1984 était celui de son grand-père ? Les aventures de cette souris hongroise débarquant aux États-Unis acquièrent une dimension personnelle insoupçonnée.

En plein cœur

Des « révélations » de ce genre, Gilles Penso en livre bon nombre. Page après page, il tourne et retourne le Rubik’s cube constitué par la personnalité, les sources d’inspiration et référents de Spielberg, cherchant à en percer les mystères et déconstruire les mécanismes. Il atteint son but lors d’un rapprochement vertigineux entre les parents Spielberg et la scène finale de Rencontres du troisième type, au détour d’une phrase désarmante de simplicité, qui nous frappe en plein cœur avec la force de l’évidence. La quête de Gilles Penso, visant à percer les secrets cachés en plein jour au sein des films de leur auteur, évoque in fine celle de Wade dans Ready Player One qui, pour obtenir les clés de l’Oasis créée par le génie fantasque Halliday, doit se montrer digne de confiance en prouvant son respect et sa compréhension des motivations intimes de l’homme Halliday, pas de la star hyper-médiatisée. Gageons que si Steven Spielberg achevait un jour la lecture de ce livre, il se sentirait mis à nu et offrirait sans état d’âme les clés de son Oasis à Gilles Penso.

 

© Jérome Muslewski

 

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