LE FANTÔME DE L’OPÉRA (1990)

Charles Dance incarne le célèbre Fantôme dans cette prestigieuse adaptation télévisée agrémentée d’un casting international…

THE PHANTOM OF THE OPERA

 

1990 – USA

 

Réalisé par Tony Richardson

 

Avec Burt Lancaster, Adam Storke, Teri Polo, Charles Dance, Ian Richardson, Andréa Ferréol, Jean-Pierre Cassel

 

THEMA SUPER-VILAINS

A l’origine de ce téléfilm conçu pour la chaîne NBC, l’auteur Arthur Kopit envisageait au départ un spectacle musical qu’il commença à écrire dans les années 80. Son idée était de développer l’aspect romantique du héros, au détriment de l’horreur, et d’utiliser de nombreux morceaux musicaux puisés dans le répertoire classique. C’est alors qu’Andrew Lloyd Webber lança son propre spectacle adapté du roman de Gaston Leroux, rendant caduque celui de Kopit. Pour ne pas abandonner son scénario et son approche, ce dernier se tourna alors vers la télévision. Son livret, riche et abondant, se transforma ainsi en téléfilm de trois heures, produit aux États-Unis et enrichi d’un casting international de très haut niveau. À contre-courant du caractère gore de la version réalisée l’année précédente par Dwight Little, ce Fantôme de l’Opéra suggère l’horreur au lieu de la montrer et prône un traitement de l’épouvante « à l’ancienne ». C’est aussi la première de toutes les adaptations à utiliser le véritable Opéra Garnier comme décor naturel.

Nouvellement nommé directeur de l’Opéra de Paris, le très snob Cholet (Ian Richardson) ne tient aucun compte des révélations de son prédécesseur, le vieux Gérard Carrière (Burt Lancaster), à propos de l’existence d’un fantôme qui hanterait le labyrinthe souterrain de l’Opéra. Le téléfilm reprend ainsi du roman l’idée de la passation de pouvoir au sein du prestigieux établissement et des instructions – non respectées – passées d’une direction à l’autre (si ce n’est que chez Leroux les directeurs allaient par paires). Campé par le très charismatique Charles Dance, le Fantôme apparaît très tôt à l’écran. Son masque élégant imite quelque peu les traits du comédien, et de fait le spectateur le reconnaît presque sous ce visage rigide et blafard. Petite nouveauté par rapport à ses prédécesseurs, il a pour habitude de porter plusieurs masques emboîtés les uns aux autres. Celui qui ne le quitte jamais est le plus sobre. Les autres semblent témoigner extérieurement de ses états d’âme. Plus ou moins sombres, plus ou moins grimaçants, ils varient du clown triste au démon agressif. Comme dans le Batman de Tim Burton, l’acteur a les yeux maquillés en noir pour que son regard ressorte mieux sous le masque. Mais au début du métrage, sa présence est la plupart du temps suggérée par sa main gantée de blanc entrant dans le champ à l’avant-plan.

La voix du maestro

L’un des atouts majeurs de ce long téléfilm est la qualité de son interprétation et de son écriture. Ainsi, malgré une mise en scène un peu anonyme et un formatage pour le petit écran (avec une coupure publicitaire toutes les dix minutes), cette adaptation occupe largement le dessus du panier, assortie de surcroit d’une très belle bande originale signée John Addison. Certes, on aurait aimé que la première rencontre entre Christine et le Fantôme, qui survient au bout d’une demi-heure de métrage, soit servie par un découpage plus inventif et plus atmosphérique que ces simples champs et contre-champs dignes d’une pièce de théâtre filmée. De même, les leçons de musique ne se déroulent pas par cloison interposée, comme dans le roman où la voix du Fantôme semblait surgir de l’au-delà, mais simplement côte à côte, comme dans un très classique salon de musique. D’ailleurs, la belle n’appelle plus son mentor « La Voix » ou « L’Ange de la musique » mais simplement « maestro ». A force de nous être montré sous un jour humain, le Fantôme perd rapidement toute aura mystérieuse ou surnaturelle. Il faut sans doute attribuer ce parti pris à l’origine du projet, qui visait d’abord à se concrétiser sous forme d’une comédie musicale renforçant le caractère romantique et sentimental du récit. Accueilli avec enthousiasme, le téléfilm de Tony Richardson remporte deux Emmy Awards ainsi que deux nominations aux Golden Globe Awards.

 

© Gilles Penso


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