POSSESSED (2009)

Une étudiante enquête sur la disparition inexpliquée de sa sœur cadette et plonge progressivement dans un cauchemar inexplicable…

BOOL-SIN-JI-OK

 

2009 – CORÉE DU SUD

 

Réalisé par Lee Yong-Joo

 

Avec Young-nam Jang, Bo-yeon Kim, Chang-jik Lee, Hee-Kyung Moon, Sang-mi Nam, Ji-eun Oh, Seung-ryong Ryu

 

THEMA DIABLE ET DÉMONS

La production fantastique coréenne est foisonnante et se distingue généralement par des films bénéficiant d’extraordinaires qualités artistiques. Possessed ne déroge pas à la règle, orné d’une photographie somptueuse, de décors chargés d’atmosphère et d’une bande originale très envoûtante. Cette patine impeccable témoigne d’un savoir-faire évident de la part du jeune réalisateur Lee Yong-ju et permet d’entrer de plain-pied dans cette sombre histoire de possession. C’est à travers le regard de l’étudiante Hee-jin (incarnée par la magnifique Nam Sang-mi) que le drame nous est narré. Un jour, la jeune fille reçoit un appel de sa mère lui apprenant la disparition soudaine de sa sœur cadette So-jin (étonnante Shim Eun-kyung). Un inspecteur de police (Ryoo Seung-yong, la trogne patibulaire et le regard las) se rend à leur domicile et conclut à une simple fugue. Mais Hee-jin est persuadée que les choses sont moins « banales » que le fonctionnaire veut bien le croire, d’autant que le quartier est frappé d’une soudaine vague de suicides et de morts brutales. Envers et contre tous, elle décide de mener sa propre enquête.

Le climat d’angoisse et d’inconfort dans lequel nous plonge Lee Yong-ju dès les premières minutes contribue beaucoup à l’efficacité du film et au conditionnement psychologique du spectateur. Dès lors, le moindre détail insolite nous saute aux yeux, le cinéaste se complaisant dans la construction de séquences d’hallucinations à mi-chemin entre le surréalisme, l’horreur et le burlesque, quelque part entre David Lynch et Takashi Miike. Témoin l’apparition insolite d’un héron en quête de dents arrachées dans un jardin, ou la vision cauchemardesque de cet homme obèse assis sur notre héroïne et la grattant avec une frénésie décuplée par des effets sonores stressants ! Lee Yong-ju ne néglige pas non plus les chocs sensoriels propices aux bonds systématiques des spectateurs sur leurs sièges. Mais pour que Possessed marque vraiment les mémoires, il eut fallu que ce matériau qualitatif se mette au service d’un récit plus rigoureux. Or ici, la confusion progressive des péripéties et l’absence opiniâtre d’explications finissent par susciter la frustration.

« L’enfer des non-croyants »

C’est d’autant plus regrettable que le cœur du récit, autrement dit l’opposition des différents courants de pensée religieux au sein d’un quartier pauvre et populaire, proposait matière à d’intéressants développements psychologiques et sociaux. Le titre original Bulshin Jiok pourrait d’ailleurs se traduire par « l’enfer des non-croyants », ce qui, avouons-le, témoigne d’une touche d’originalité rafraîchissante par rapport au très convenu Possessed choisi pour la distribution internationale. Car sous ses atours horrifiques, le film de Lee Yong-ju est surtout la métaphore d’une enfance sacrifiée sur l’autel du fanatisme religieux, prise entre les feux du christianisme et du paganisme. Or le récit s’éparpille, effectue quelques écarts excessifs (l’homme qui meurt au milieu d’hectolitres de vomi !) mais ne résout pas les conflits qu’il se contente de placer sous le feu des projecteurs. Possessed fait pourtant partie de ces œuvres qui valent un petit détour pour les fulgurances rares mais intenses qui le ponctuent.

 

© Gilles Penso


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