LES 1001 NUITS (1990)

Un casting international, mené par Catherine Zeta-Jones, Thierry Lhermitte et Gérard Jugnot, s’agite dans cette relecture bizarre des contes d’Orient…

LES 1001 NUITS

 

1990 – France / ITALIE / ALLEMAGNE

 

Réalisé par Philippe de Broca

 

Avec Thierry Lhermitte, Gérard Jugnot, Catherine Zeta-Jones, Stéphane Freiss, Vittorio Gassman, Roger Carel, Georges Montillier, Alfredo Pea, Eric Métayer

 

THEMA MILLE ET UNE NUITS

Au début des années 90, Philippe de Broca amorce le dernier tournant de sa carrière, après une filmographie spectaculaire orientée vers la comédie et l’aventure. Nous lui devons quelques-uns des rôles les plus mémorables de Jean-Paul Belmondo (Cartouche, L’Homme de Rio, Les Tribulations d’un Chinois en Chine, Le Magnifique, L’Incorrigible). Notre homme a donc du métier et du prestige. Désireux de s’attaquer à une comédie revisitant l’histoire de Shéhérazade, il se tourne d’abord vers les scénaristes Agenore Incrocci et Furio Scarpelli (Les Monstres, Le Bon la brute et le truand, Nous nous sommes tant aimés, Le Bal). Mais le résultat le déçoit tant qu’il décide finalement d’écrire lui-même, avec l’aide de Jérôme Tonnerre. Le film étant une co-production européenne entre la France, l’Italie et l’Allemagne, le casting se doit d’être international. Les deux rôles masculins principaux sont assurés par deux ex-membres du Splendid, Thierry Lhermitte et Gérard Jugnot, et celui de la belle Shéhérazade est destinée à Mathilda May. Mais cette dernière décline la proposition. De Broca se tourne alors vers une inconnue qui n’a alors joué nulle part : Catherine Zeta-Jones. « Je me suis dit : c’est elle ! », raconte-t-il. « Ce fut un coup de foudre, comme ça ! J’ai passé l’hiver à convaincre le producteur qu’elle était le personnage. Et je ne l’ai pas regretté » (1). L’actrice débutante pousse l’implication jusqu’à se déshabiller face à la caméra pour une scène de saut d’hélicoptère homérique.

Le principe du film est de faire du génie (Jugnot) un astrologue qui, à cause d’un blasphème, se retrouve exilé dans l’Angleterre pluvieuse du vingtième siècle. Sa punition prendra fin le jour où quelqu’un mettra la main sur une vieille lampe magique. Parallèlement, en pleine antiquité orientale, Shéhérazade passe la nuit avec le roi (Lhermitte) puis se retrouve condamnée à avoir la tête tranchée. Mais les deux fils du bourreau lui demandent de raconter son histoire, ce qui lui offre un petit sursis. Elle narre ainsi comment, après avoir échappé à un marché d’esclaves, elle rencontra Aladin (Stéphane Freiss), un jeune idéaliste chez qui elle trouva la vieille lampe magique. Le scénario du film repose ainsi sur une étonnante notion de porte spatio-temporelle représentée par cette fameuse lampe. D’un côté se démène ainsi Shéhérazade au temps des contes arabes, de l’autre le génie qui suit ses pérégrinations à travers un téléviseur.

Anachronismes

À l’époque de sa sortie, Les 1001 nuits fit beaucoup parler de lui, pas tant à cause de sa distribution attrayante ou de son budget conséquent, mais parce qu’il se positionnait comme une production d’avant-garde dans le domaine des effets spéciaux, mixant les méthodes traditionnelles avec une technologie numérique encore très rare dans le cinéma européen. De très belles peintures sur verre de Jean-Marie Vives (les plans larges de Bagdad), des effets mécaniques inventifs supervisés par Éric Faivre (la moto invisible), des trucages optiques variés signés Excalibur (les déformations de Jugnot) et des images de synthèse conçues par la société Ex Machina se succèdent donc à l’écran avec panache, sous la supervision éclairée de Christian Guillon. Ces effets ont depuis pris un inévitable coup de vieux, mais ce n’est pas là que le bât blesse. Les 1001 nuits souffre surtout d’un scénario évasif qui s’avère incapable d’exploiter ses nombreuses idées, laissant traîner en longueur des séquences très anecdotiques (le voyage accidentel de Sinbad, les numéros de cirque de Lhermitte et Jugnot) sans parvenir à captiver ses spectateurs. Comme la mise en scène de De Broca ne fait par ailleurs aucun effort pour dynamiser cette maigre intrigue, le film s’essouffle et ne vaut finalement que pour une poignée de saynètes réussies. On note que Les 1001 nuits existe sous deux formats différents : une version cinéma de 108 minutes et une version télévisée de quatre fois 50 minutes.

 

(1) Extrait de l’autobiographie de Philippe de Broca parue en 1990 aux éditions Henri Veyrier.

 

© Gilles Penso


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