YOGA HOSERS (2016)

Dans la foulée de Tusk, Kevin Smith met en scène des hommes-saucisses miniatures créés par les nazis pour envahir le Canada !

YOGA HOSERS

 

2016 – USA

 

Réalisé par Kevin Smith

 

Avec Lily-Rose Depp, Harley Quinn Smith, Johnny Depp, Justin Long, Austin Butler, Adam Brody, Ralph Garman, Tony Hale, Natasha Lyonne, Haley Joel Osment

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

Yoga Hosers est le deuxième épisode de la « trilogie canadienne » réalisée par Kevin Smith après le très étonnant Tusk, et en attendant un hypothétique Moose Jaws (une parodie des Dents de la mer… avec un élan !). Si Tusk parvenait à équilibrer l’humour noir et l’horreur viscérale avec une justesse de ton étonnante, jouant sans cesse le grand écart entre le rire et le malaise, il s’entachait d’une fausse note embarrassante : la présence caricaturale et grotesque de Johnny Depp sous la défroque d’un détective privé outrageusement grimé au comportement excessif. Le problème, c’est que ce personnage est désormais central dans Yoga Hosers qui, contrairement à son prédécesseur, décide d’assumer pleinement sa tonalité comique. Un tel parti pris allait-il s’avérer payant ? Rien n’était moins sûr. Le titre du film, énigmatique, s’appuie sur une expression canadienne familière, « hosers », qui décrit les personnes stupides ou incultes. On pourrait donc approximativement le traduire par « les idiots du yoga », ce qui ne nous avance pas beaucoup plus. En tête d’affiche, nous découvrons deux actrices adolescentes, Lily-Rose Depp et Harley Quinn Smith, autrement dit la fille de l’acteur principal et celle du réalisateur. Nous sommes donc « en famille ».

Lily-Rose et Harley Quinn interprètent Colleen Collette et Colleen McKenzie, deux jeunes filles qui passent leurs journées à étudier le yoga avec leur gourou Yogi Bayer (Justin Long, endossant donc un rôle différent de celui qu’il jouait dans Tusk), à travailler après l’école dans une supérette et à jouer de la musique dans un groupe spécialisé dans les reprises. Lorsque Bob (Tony Hale), le père d’une des deux ados, décide de partir en week-end avec sa petite amie Tabitha (Natasha Lyonne), nos jeunes héroïnes se retrouvent seules en charge du magasin. Or le lycéen pour lequel l’une d’entre elles a le béguin organise une fête ce soir-là. Pour ne rien manquer, elles décident de faire venir les invités sur leur lieu de travail. À partir de là, les choses dégénèrent et le scénario s’achemine tranquillement vers la révélation de son concept parfaitement délirant : les « Bratzis », des hommes-saucisses miniatures créés jadis par le troisième Reich pour envahir le Canada, viennent d’être réactivés accidentellement !

Sausage Party

Nous étions tout disposés à entrer dans le délire de Kevin Smith. Mais encore eut-il fallu que le réalisateur sache quoi faire d’un tel sujet au lieu de le noyer dans une masse de scènes interminables où les comédiens, en totale roue libre, accumulent les « private jokes », les clins d’œil cinéphiliques éculés (les musiques de Shining et Halloween, l’intervention à côté de la plaque de Stan Lee, l’insupportable festival d’imitations d’acteurs américains) et les gags ratés. Yoga Hosers tombe donc à plat, étirant interminablement chacune de ses séquences prétendument drôles et s’appuyant sur le talent hélas très limité de ses actrices vedettes. Le discours que Kevin Smith tente d’amorcer sur la dépendance de la jeunesse aux téléphones portables et sur leur rapport à la célébrité éphémère se noie dans ce trop-plein d’autosatisfaction qui n’a aucune chance de s’assurer la complicité des spectateurs. Le public ignora d’ailleurs poliment ce film considéré globalement comme l’un des plus faibles de son auteur. Oublions donc cet écart de route anecdotique pour nous rappeler que Smith nous offrit des œuvres de la trempe de Clerks, Dogma et Red State.

 

© Gilles Penso


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