DANS LA PEAU DE JOHN MALKOVICH (1999)

Un marionnettiste découvre un jour une porte dérobée qui donne accès à l’intérieur de la tête de John Malkovich !

BEING JOHN MALKOVICH

 

1999 – USA

 

Réalisé par Spike Jonze

 

Avec John Cusack, Cameron Diaz, Catherine Keener, John Malkovich, Mary Kay Place, Orson Bean, Ned Bellamy

 

THEMA MONDES VIRTUELS ET MONDES PARALLÈLES

Spike Jonze se fait d’abord connaître comme réalisateur de clips, notamment pour les Beastie Boys, Björk, Fat Boy Slim ou Daft Punk. Sa famille cinématographique s’élargit lorsqu’il épouse Sofia Coppola, fille du grand Francis Ford et déjà réalisatrice d’un très remarqué Virgin Suicide. Pour son premier long métrage, Jonze a la brillante idée de s’associer au scénariste Charles Kaufman, dont l’univers atypique s’était jusqu’alors cantonné au petit écran. Dans la peau de John Malkovich nous offre une entrée en matière très poétique au cours de laquelle le marionnettiste de rue Craig Schwartz (John Cusack) crée des spectacles épurés mais magnifiques (l’animation de ses pantins de bois est très expressive malgré l’immobilité de leur visage). Mais cette activité artistique n’est pas vraiment rémunératrice, et Craig postule pour un poste administratif dans l’entreprise Lester. À partir de là, le film bascule dans un univers digne des Monty Pythons, car le bureau du jeune homme se situe à l’étage « sept et demi » de l’immeuble (poussant le perfectionnisme jusqu’à l’absurdité, Kaufman et Jonze situent cette information à sept minutes et demie du métrage !). Le plafond trop bas de cet étage oblige tous les employés à avancer en se courbant, et le bureau ferme ses portes à quatre heures onze précises. Nous sommes donc en pleine absurdie. Mais ce n’est encore qu’un début.

Un jour, en classant des dossiers, Craig découvre une porte dérobée et l’emprunte. Là se trouve un passage qui mène pendant quinze minutes à l’intérieur de la tête du comédien John Malkovich. Stupéfait par cette découverte, notre marionnettiste en parle à sa collègue Maxine (Catherine Keener) dont il est amoureux, et tous deux montent une entreprise très fructueuse qui propose aux gens d’entrer dans ce monde parallèle improbable. Mais un jour, Lotte (une Cameron Diaz méconnaissable), la femme de Craig, emprunte à son tour le passage, tandis que Maxine est en train de flirter avec Malkovich. Par l’intermédiaire de l’acteur, elles finissent par tomber amoureuses l’une de l’autre.

Peut-on entrer dans sa propre tête ?

Déjà vertigineux, le scénario s’emballe davantage lorsque Craig, jaloux, se rend compte qu’il peut manipuler Malkovich de l’intérieur, comme il le fait avec ses marionnettes à fil. Il se faufile donc dans le passage, entre dans la peau de l’acteur et, faisant croire que Lotte se trouve à sa place, fait l’amour avec Maxine. Ce bon vieux Malkovich finit peu à peu par sentir que quelque chose d’anormal se trame sur son dos, jusqu’à découvrir le pot aux roses. Passées la surprise puis l’indignation, il décide de tenter lui-même l’expérience, autrement dit entrer dans sa propre tête ! « Que se passe-t-il quand un homme emprunte lui-même son propre chemin ? » s’interroge alors Craig. Réponse : la plongée dans un univers alternatif où tout le monde a la tête de Malkovich et où un seul mot existe : « Malkovich »… Le scénario va ainsi au bout de son délire tout en développant en filigrane une métaphore liée à l’identité. Qu’est-ce qui nous définit de prime abord ? semble nous demander ce scénario à tiroirs. Notre enveloppe corporelle ou ce qui se trouve caché à l’intérieur ? « Sois toi-même » pourrait d’ailleurs en être le slogan. Fort de cette expérience joyeusement atypique, Charles Kaufman poursuivra ses expériences avec des œuvres aussi singulières qu’Adaptation, Human Nature ou l’extraordinaire Eternal Sunshine of the Spotless Mind.

 

© Gilles Penso

 

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