BABY BLOOD (1988)

Alain Robak crée l'événement en réalisant l'un des premiers vrais films gore de l'histoire du cinéma français

BABY BLOOD

1988 – FRANCE

Réalisé par Alain Robak

Avec Emmanuelle Escourrou, François Frappier, Rémy Roubakha, Christian Sinniger, Jean-François Gallotte, Jacques Audiard

THEMA ENFANTS

Au milieu des années 80, Alain Robak avait réalisé quelques courts-métrages fantastiques assez réjouissants, dont une satire sanglante pour l’anthologie Adrénaline produite par Yann Piquer. A l’occasion de son premier long-métrage, il n’y va pas avec le dos de la cuiller et concocte un savoureux cocktail de gore, d’humour et d’érotisme dénué du moindre complexe. L’étonnante et plantureuse Emmanuelle Escourrou interprète Yanka, égérie d’un directeur de cirque doublé d’un dompteur excessivement jaloux. Un beau jour, elle commence à ressentir des troubles inquiétants à l’intérieur de son ventre, et finit par comprendre qu’elle est enceinte d’un bébé engendré par un reptile. Son fœtus lui réclamant du sang pour se nourrir et croître, Yanka va se transformer en mère nourricière tueuse, écumant la France en quête d’un nombre croissant de victimes qu’elle attire grâce à ses charmes indéniables.

« Quand on réalise un film comme Baby Blood, on sait qu’on ne disposera pas d’un budget et d’un planning luxueux », nous explique Alain Robak. « Nous avons donc tourné en 25 jours, et autant dire que notre rythme de travail était très soutenu. » (1) Réalisés par un Benoît Lestang particulièrement inspiré malgré des moyens ridicules, les très nombreux effets gore du film s’avèrent franchement réussis, et assurent à Baby Blood une petite collection de séquences sanguinolentes et cartoonesques du plus réjouissant effet. « Il y avait deux versions du bébé », nous détaille le regretté Lestang, qui joue le petit rôle d’un ambulancier dans le film. « Une inerte pour les plans larges et une mécanisée pour les plans rapprochés. Nous avons souvent filmé dans des conditions abracadabrantes, avec des moyens minuscules » (2) Evidemment, lorsqu’on visionne un film comme Baby Blood, une connivence entre le spectateur et le spectacle s’impose. Il faut accepter l’amateurisme de certains effets de mise en scène dû à ces fameuses « conditions abracadabrantes », le réalisme tout relatif des trucages et les rebondissements évasifs d’un scénario basique conçu comme un road movie sanglant à mi chemin entre l’horreur et la comédie.

Entre l'horreur et la comédie

A ce titre, Baby Blood se positionne en équilibre entre son inspiration anglo-saxonne (on pense aux films de Frank Hennenlotter – Frère de sang et Elmer le remue-méninges) et sa gestion de l’humour et des seconds rôles typiquement française. On s’amuse ainsi des prestations furtives de plusieurs « guest stars » telles que Jean-Yves Lafesse, Jean-Claude Romer, Yann Piquer, Jacques Audiard et surtout Alain Chabat en victime hystérique de l’opulente Yanka. Robak lui-même interprète un ambulancier terrassé par le monstre. « Ariel Zétoun est devenu co-producteur du film un peu par hasard, par l’intermédiaire d’un ami commun », raconte le réalisateur. « Un jour, il est venu nous voir sur le tournage, et l’ambiance était tellement survoltée qu’il a pris peur. Il était persuadé que je ne savais pas diriger un film et que l’entreprise allait virer à la catastrophe ! » (3) Au moment de sa sortie, Baby Blood fit son petit effet, car le cinéma français ne nous avait alors guère habitué à une telle audace en matière d’horreur et d’effets spéciaux. Aux Etats-Unis, le film de Robak fut distribué sous le titre The Evil Within


(1) et (3) Propos recueillis par votre serviteur en mai 2005
(2) Propos recueillis par votre serviteur en décembre 1996

© Gilles Penso

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