THE INNKEEPERS (2011)

Ti West nous emmène dans un hôtel hanté en échappant comme toujours aux tendances de son époque pour chercher l'inspiration dans l'épouvante d'antan

THE INNKEEPERS

2011 – USA

Réalisé par Ti West

Avec Sara Paxton, Kelly McGillis, Pat Healy, George Riddle, Lena Dunham, Alison Bartlett

THEMA FANTÔMES

Auteur de l’old school The House of the Devil, Ti West récidive dans le registre du film de maison hantée avec The Innkeepers qui doit se contenter, refrain connu, d’une sortie en DTV en n’ayant connu qu’une seule projection sur le sol hexagonal lors du festival du PIFFF. Cette fois, l’exploration a lieu dans un hôtel réputé habité par quelque obscur fantôme, condamné à une fermeture définitive dans une poignée de jours. Seul le deuxième étage reste accessible aux rares clients qui poussent la porte et doivent traiter avec Claire et Luke, derniers employés assistant au naufrage pendant que leur patron est en vacances. Branchés par le paranormal, les deux geeks décident de mener l’enquête et, pour ce faire, d’enregistrer les manifestations du spectre légendaire résidant dans les lieux. Quitte à négliger, pour y parvenir, les locataires casse-bonbons (une mère et son braillard, une actrice en plein déclin passé maîtresse en utilisation du pendule – Kelly McGillis, savoureuse -, un veuf désireux de loger dans la chambre de sa nuit de noces) et les précautions élémentaires en termes de communication avec le monde de l’au-delà…

Qu’on se le dise, Ti West n’est pas homme à se conformer aux tendances actuelles. C’est avant tout un passionné qui conjugue un bagage cinéphilique démentiel et un sens aigu de la mise en scène et de l’écriture scénaristique. La conjonction de ces deux facettes aboutit à un cinéma d’épouvante à l’ancienne. L’exposition, devenue cache-misère dans la majorité des œuvrettes actuelles, se fait signifiante, la caractérisation des personnages ne s’encombre d’aucune fioriture (la relation entre le cynique Luke et la belle Claire est basée sur des sous-entendus et des non-dits, les personnages secondaires prennent de l’ampleur à mesure que l’intrigue évolue), la suggestion et le hors-champ supplantent le tout-effet-numérique ambiant.

Entre comédie et épouvante

En l’état, The Innkeepers, comme beaucoup de films-phares des 80’s, s’accommode d’ailleurs assez mal de l’étiquette horrifique et taquine le domaine de la comédie durant une heure avant de s’aventurer dans l’épouvante qui n’en devient que plus éprouvante. Avec la même efficacité que la sonnette qui retentit pour signifier la pénétration de l’invisible dans le champ des enquêteurs. West s’amuse ainsi dans un premier temps à faire peur “pour de faux”, à l’image des zigotos s’offrant des frissons à partir de détails insignifiants. La menace d’abord diffuse s’intensifie, se densifie de minute en minute et l’apparent immobilisme imprimé au récit vire soudain à un tour en train-fantôme particulièrement efficace. Roublard, Ti West nous immerge lentement mais sûrement dans son hôtel hanté, nous met à l’aise dans ces murs défraichis, nous permet de copiner avec ses anti-héros pour mieux nous effrayer le moment venu. The Innkeepers rappelle à tous les vidéastes déviants et autres empaqueteurs de diables en boîte que la peur, la vraie, ne peut se satisfaire de quelques ressorts épisodiques : elle est avant tout affaire de contexte, de situation, n’émerge que dans un cadre défini, familier, réaliste. Le “grand frisson” mis au point par Ti West s’avère au final plus élégant et efficace que le “grand sursaut”, symbolisé ici par ces vidéos absurdes réclamant l’attention de l’internaute avant qu’un monstre ne surgisse à l’écran.

 

© Damien Taymans

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