LES GARDIENS DE LA GALAXIE (2014)

Transfuge des productions Troma, le garnement James Gunn intègre l'univers Marvel sans rien perdre de son grain de folie

GUARDIANS OF THE GALAXY

2014 – USA

Réalisé par James Gunn

Avec Chris Pratt, Zoe Saldana, Dave Autista, Michael Rooker, et les voix de Bradley Cooper et Vin Diesel

THEMA SPACE OPERA I SUPER-HEROS I EXTRA-TERRESTRES I SAGA MARVEL I AVENGERS

Avec la construction méthodique d’un univers complexe conçu comme une gigantesque saga ultra-lucrative, le studio Marvel semblait avoir déniché la poule aux œufs d’or. De la trilogie Iron Man au diptyque Captain America en passant par les deux Thor et le choral Avengers, la firme aux super-héros balisait un terrain confortable, flattant les amateurs des comics de Stan Lee tout en se ralliant un raz de marée de jeunes spectateurs enthousiastes. Qu’est-il donc passé par la tête des cadres de Marvel/Disney en initiant Les Gardiens de la Galaxie ? Difficile d’imaginer un projet aussi risqué. Qu’on en juge : des héros totalement inconnus du grand public, un environnement de space opera qui valut au studio Disney l’un de ses plus gros flops (John Carter), un ton décalé en équilibre instable entre le premier degré et la parodie potache, des protagonistes improbables (un raton laveur hargneux, un homme-arbre taciturne) et surtout un réalisateur absolument pas consensuel. Car James Gunn, co-auteur de Tromeo et Juliette, scénariste de L’Armée des Morts, réalisateur de Horribilis et Super, n’a pas vraiment le profil d’un « yes man » acquiesçant face à toutes les demandes d’un studio tout-puissant. La réussite et le succès des Gardiens de la Galaxie n’en sont que plus remarquables, Gunn nous offrant un film de science-fiction grandiose et spectaculaire sans rien perdre de son irrévérence.

Dans un rôle qui semble conçu comme un hommage aux héros incarnés par Harrison Ford dans les années 70/80, quelque part à mi-chemin entre Han Solo et Indiana Jones, Chris Pratt incarne Peter Quill, un aventurier traqué par tous les chasseurs de prime pour avoir volé un mystérieux globe convoité par le redoutable Ronan. Pour éviter que cet item ne tombe en de mauvaises mains, Quill conclue une alliance avec quatre aliens qu’il rencontre dans une prison spatiale : le raton laveur génétiquement modifié Rocket, l’humanoïde végétal Groot, le massif Drax et la mystérieuse Gamora. Cette équipe hétéroclite et mal assortie devient bizarrement le dernier rempart contre la destruction qui menace la galaxie toute entière. 

Plus complexe et profond qu'il n'y paraît

Si Gunn connaît ses classiques et leur rend ici un vibrant hommage (la saga Star Wars initiale nous vient souvent à l’esprit), d’autres références moins évidentes affleurent au fil du film (la scène de l’évasion du pénitencier interstellaire évoque Star Crash de Luigi Cozzi), tandis que le cinéaste affirme fièrement ses origines en laissant apparaître quelques secondes son ancien employeur Lloyd Kaufman, légendaire patron de Troma Films. Mais l’un de ses apports les plus intéressants est le choix d’une bande originale scandée par des standards pop/rock des années 70/80. Totalement intégré au récit (les musiques sont les extraits d’une playlist sur cassette audio que la mère de Peter Quill lui légua avant de succomber), ce parti-pris n’est pas une simple démarche post-moderne visant à cligner de l’œil vers le spectateur et à affirmer le statut « cool » du film. Il s’agit aussi et surtout d’un vecteur d’émotion inattendu au sein d’une poignée de séquences en état de grâce. Voilà tout le paradoxe d’une œuvre finalement plus complexe et plus profonde qu’il n’y paraît.

 

© Gilles Penso

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