LE LAC DES MORTS-VIVANTS (1980)

Réalisé par Jean Rollin caché sous pseudonyme, ce film de zombies est tellement mal-fichu qu'il en devient foncièrement drôle

LE LAC DES MORTS-VIVANTS

1980 – FRANCE

Réalisé par J.A. Lazer (alias Jean Rollin)

Avec Howard Vernon, Anouchka, Pierre Escourou, Anthony Mayans

THEMA ZOMBIES I SAGA JEAN ROLLIN

Entre deux films érotico-fantastiques personnels, Fascination et La Nuit des Traquées, Jean Rollin signait pour la compagnie Eurociné cet impayable Lac des Morts-Vivants sous le pseudonyme de J.A. Lazer, dans l’espoir manifeste de profiter de la vogue des « zombie movies » suscitée par les œuvres de George Romero et Lucio Fulci. Ce film d’exploitation commandé par le producteur Marius Lesœur peut sembler éloigné du style habituel de l’auteur du Viol du Vampire, mais ce dernier fut en réalité appelé à la rescousse après que Jess Franco ait déserté le tournage, mécontent des innombrables restrictions budgétaires qui lui furent imposées. C’est donc avec un budget ridicule, une caméra déficiente et des effets spéciaux au rabais que Rollin emballe ce Lac des Morts-Vivants. Le prologue donne dans l’érotisme bucolique. Une jolie demoiselle fait un strip-tease intégral dans un petit coin de nature, se fait bronzer, puis s’en va batifoler dans le lac voisin, envoyant valdinguer un panneau annonçant que la baignade est dangereuse. Bientôt, un zombie borgne en uniforme nazi surgit et l’entraîne sous l’eau. Une femme qui s’en va battre son linge au lavoir est la seconde victime. Un zombie au maquillage ridicule (des lambeaux de latex mal collés menacent de se détacher de son visage) sort de l’eau, la suit, se jette très mollement sur elle puis lui suce le sang, tandis que la caméra, ne sachant trop comment filmer cette « action », tourne autour des deux acteurs sans conviction.

Une journaliste vient bientôt enquêter sur le « lac maudit », et s’entretient avec le maire du village (Howard Vernon, acteur fétiche de Jess Franco) qui lui raconte la légende locale. Pendant la guerre, une Française du village s’amouracha d’un jeune soldat allemand qui lui sauva la vie en lui évitant de sauter avec une bombe. Ils s’aimèrent – d’où une scène érotique besogneuse dans une grange – et de leur union naquit un nouveau-né. Puis un groupe de résistants tendit une embuscade au détachement allemand et les massacra avant de camoufler leurs corps, tandis que trépassèrent la mère et son bébé. « Nous avons fabriqué une horde de zombies destructeurs », conclue le maire. « L’air les traverse, l’eau leur sert de refuge, et la terre ne pourra jamais les transformer en poussière. »

« Nous avons fabriqué une horde de zombies destructeurs ! »

Et tandis que les morts-vivants multiplient leurs attaques orientées vers les filles dénudées (une équipe de basket féminine hilare, une femme en porte-jarretelles, une baigneuse aux seins nus), le spectateur soupire, incrédule. Joué par des acteurs catastrophiques, intégralement post-synchronisé, affreusement mis en musique, filmé n’importe comment, Le Lac des Morts-Vivants peut largement concourir dans la catégorie des pires films fantastiques de l’histoire du cinéma. Cela dit, avec ses dialogues absurdes (Vernon qui ordonne à des villageois armés de fusils d’aller préparer leurs fusils !), ses scènes aquatiques ratées (dans les vues sous-marines, on voit bien que les zombies sont dans une piscine dont les bords ont maladroitement été cachés par du tissu noir !) et ses séquences d’émotion pathétiques (les retrouvailles vibrantes entre un soldat zombie et sa fille), le film est un morceau de choix pour les amateurs d’humour involontaire.

 

© Gilles Penso

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