ORCA (1977)

Le producteur Dino de Laurentiis tente de surfer sur la vague des Dents de la Mer en remplaçant le requin par un orque à la mâchoire bien garnie

ORCA, THE KILLER WHALE

1977 – USA

Réalisé par Michael Anderson

Avec Richard Harris, Charlotte Rampling, Bo Derek, Keenan Wynn, Robert Carradine, Will Sampson, Charles Scott Walker

THEMA MONSTRES MARINS I MAMMIFERES

Un an après avoir massacré en règle le mythe de King Kong, le producteur Dino de Laurentiis décide de manger au râtelier des Dents de la Mer en y ajoutant une bonne dose de Moby Dick. Pour tout avouer, le résultat n’est pas si catastrophique qu’on aurait pu le craindre. Car Orca est un honnête film d’action qui ne lésine ni sur les effets spéciaux, ni sur les séquences mouvementées. Quant au réalisateur Michael Anderson (L’Âge de Cristal), il s’acquitte de sa tâche avec un talent indéniable. Le capitaine Nolan (Richard Harris), désireux de s’attirer la fortune en capturant un orque-épaulard, y entreprend une expédition au large des côtes du Canada pour chasser l’un de ces mammifères marins. Mais le seul résultat de cette chasse est la mort d’une femelle enceinte et la blessure du mâle. Le monstre marin, face à la perte de sa compagne, est déchiré par la douleur, qui se transforme vite en haine. Et l’orque géant se vengera terriblement, ravageant les embarcations d’un village côtier, dévorant les pêcheurs, et menaçant le capitaine Nolan qui accepte, bien malgré lui, de relever le défi et de combattre l’animal. 

Certes, Orca ne surprend pas vraiment dans la mesure où ses thèmes ont tous déjà été développés et parce que le suspense et les scènes dramatiques, pour efficaces qu’ils soient, n’évitent pas les lieux communs du genre. Mais le scénario de Sergio Donati et Luciano Vincenzoni présente la particularité d’inverser les rôles tenus par la baleine et le capitaine chez Herman Melville et tous ses descendants. Ici, en effet, c’est le mammifère marin qui a pris l’homme en grippe et le pourchasse inlassablement dans l’espoir de le réduire à néant. Parmi ses atouts, Orca compte des effets visuels soignés de Frank van Der Veer, des créations mécaniques convaincantes de Giuseppe Carozza et Jim Hole, une partition envoûtante d’Ennio Morricone et un climax très spectaculaire visualisant avec emphase l’affrontement final entre l’homme et le cétacé. Les amateurs de beautés exotiques apprécient également la présence très photogénique (à défaut d’être très charismatique) de Charlotte Rampling en biologiste marine et de Bo Derek en assistante du capitaine Nolan.

Moby Dick à l'envers

Signe des temps, le film se pare d’une dimension écologique bienvenue. Ici, l’orque n’est pas un simple monstre destructeur (comme le laisse imaginer son surnom américain « killer whale », autrement dit « baleine tueuse ») mais un mammifère monogame et intelligent, doté d’émotions, de mémoire et du sens de la communication. A travers l’analyse scientifique du professeur Bedford (Rampling) et les légendes ancestrales évoquées par le brave Umilak (Will Sampson), c’est donc à une créature complexe et insaisissable que nous avons affaire. Cette approche passionnante est quelque peu amenuisée par l’anthropomorphisme avec lequel est traité l’animal vedette et par le sens du mélo qui teinte trop outrageusement certaines scènes. Fort déconsidéré au moment de sa sortie, notamment à cause de ses trop grandes similitudes avec le drame aquatique de Steven Spielberg, Orca n’est finalement pas le plagiat tant décrié et mérite sans doute une plus juste réévaluation.

 

© Gilles Penso

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