L’ATLANTIDE (1921)

Une superproduction de grande envergure adaptant pour la première fois à l'écran le roman épique de Pierre Benoît

L’ATLANTIDE

1921 – FRANCE

Réalisé par Jacques Feyder

Avec Stacia Napierkowska, Georges Melchior, Jean Angelo, Marie-Louise Ribe, Abd-el-Kader Ben Ali, Mohamed Ben Noui

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE

Première adaptation du roman homonyme de Pierre Benoît, L’Atlantide est l’une des œuvres majeures de Jacques Feyder, qui travailla par la suite des deux côtés de l’Atlantique. S’acquittant des droits du livre contre 10 000 francs, Feyder décida de transporter pendant près d’un an son équipe dans le désert du Sahara, et il faut avouer que le choix est judicieux, car les extérieurs naturels du film sont un atout indiscutable, à la fois pour sa photogénie et son réalisme quasi-documentaire. Mais ce parti pris, assorti aux décors édifiés en studio et aux importantes séquences de figuration à cheval, fait grimper le budget à deux millions de francs, une somme considérable pour l’époque.

Tout commence dans le désert du Hoggar. Le carton d’introduction nous annonce que le méhari qui s’y égare périt ou devient sauvage. C’est là qu’une caravane découvre un homme à moitié mort de soif, le lieutenant de Saint-Avit. Le corps principal du récit prend dès lors la forme d’un grand flash-back, Nous y découvrons Saint-Avit et le capitaine Morhange en pleine traversée des dunes algériennes. En s’abritant d’une tempête de sable, nos deux explorateurs découvrent une énigmatique inscription grecque sur les parois d’une grotte : « Antinéa ». Ils trouvent aussi à proximité un autochtone, Eg-Anteouen, qui s’est fait détrousser par des maraudeurs et leur propose en guise de remerciement de les conduire dans le Hoggar, où d’autres inscriptions identiques ornent les cavernes. Sur place, ils comprennent qu’ils sont tombés dans un piège. Saint-Avit et Morhange échouent ainsi dans une zone tropicale qu’aucune carte ne répertorie. « Vous êtes ici au centre de ce qui fut jadis l’île Atlantide », leur explique l’archiviste du palais. « Dans la catastrophe qui engloutit l’Atlantide, neuf mille ans avant notre ère, la partie centrale de l’île n’a pas été submergée par les flots. Après l’assèchement de la mer saharienne, seule a subsisté cette oasis merveilleuse, isolée à jamais du monde des vivants par sa ceinture d’infranchissables montagnes. » Là règne la reine Antinéa, qui attire ses amants puis les laisse mourir avant de transformer leur dépouille en statue d’or.

« Suis-moi je te fuis, fuis-moi je te suis… »

Lorsque cette cruelle dictatrice fait son apparition, au bout d’une heure vingt de film, c’est dans une immense robe camouflant la majeure partie de sa personne. Il faut bien avouer que son charme, une fois dévoilé, est très discutable, car la comédienne Stacia Napierkowska ne se distingue ni par la sveltesse de sa silhouette, ni par la finesse de ses traits. Antinéa connaît d’ailleurs l’affront de sa vie en étant rejeté pour la première fois par un homme, en l’occurrence Morhange, dont elle est en train de tomber amoureuse, suivant le vieil adage « suis moi je te fuis, fuis moi je te suis ». La vengeance de la reine sera à la hauteur de son humiliation. Spectaculaire à souhait, cette adaptation intègre dans son flash-back général d’autres flash-backs locaux (l’enlèvement du lieutenant Massard, la mésaventure de l’esclave Tanit-Zerga) qui enrichissent certes le récit mais l’allongent parfois excessivement. Le métrage atteint donc presque les trois heures, ce qui ne fit guère reculer les foules de spectateurs lui assurant un succès immédiat et une longévité exceptionnelle sur les écrans.

 

© Gilles Penso

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