Mark Lewis, jeune opérateur de cinéma, est un garçon névrosé. Reporter amateur, cinéphile et collectionneur de bouts de films, son œil est toujours à l’affût. Mais son penchant pour le voyeurisme et les images fortes le pousse à provoquer lui-même des mises en scène horribles. A cet effet, il filme les assassinats qu’il commet sur des jeunes femmes en leur perçant la gorge avec le pied acéré de sa caméra 16 mm. Grâce à un miroir parabolique placé au-dessus de l’objectif, les victimes se voient mourir, et c’est leur réaction que Mark cherche à capter. Ce mode opératoire sanglant s’exerce exclusivement envers les femmes dont la profession les amène à s’offrir au regard des autres : une prostituée, une starlette exhibitionniste, un mannequin… Contemporain de Psychose, Le Voyeur est un film d’autant plus troublant que son tueur psychopathe – à l’instar de Norman Bates – s’avère timide et attachant. Michael Powell confie ce rôle délicat à Carl Boehm, que le grand public connaissait alors pour son rôle d’archiduc François-Joseph dans Sissi l’impératrice. Si les meurtres sont montrés crument sans chercher à évacuer leur violence primaire, l’une des scènes les plus fortes est probablement celle de la projection du vieux film dans lequel Mark, enfant, est terrorisé par son père (incarné par Michael Powell lui-même). Ce dernier étudie ses réactions face à la peur, jetant par exemple un gros lézard vivant dans son lit.