PRINCESS BRIDE (1987)

Le quatrième long-métrage de Rob Reiner est un conte de fées pas comme les autres, jouant avec les codes du genre pour mieux les détourner…

THE PRINCESS BRIDE

 

1987 – USA

 

Réalisé par Rob Reiner

 

Avec Cary Elwes, Robin Wright, Peter Falk, Mandy Patinkin, Chris Sarandon, Christopher Guest, Billy Crystal, Wallace Shawn, André le Géant

 

THEMA CONTES

En 1973, le studio 20th Century Fox fait l’acquisition des droits d’adaptation du roman « Princess Bride » de William Goldman et prépare le film qui en sera tiré, avec Richard Lester derrière la caméra. Le projet part plutôt bien, jusqu’à ce qu’un changement de direction au sein du studio ne l’annule purement et simplement. L’auteur rachète alors lui-même les droits d’adaptation de son livre en attendant qu’un nouveau projet de film ne se concrétise. Les choses redémarrent lorsque Rob Reiner découvre le livre, que lui offre un jour son père, et en tombe amoureux. Tout auréolé des succès de Spinal Tap, The Sure Thing et surtout Stand By Me, Reiner a suffisamment de poids pour relancer la transformation du roman en film, travaillant de près avec Goldman pour s’assurer que son récit soit respecté à l’écran. Pour incarner son couple vedette, Reiner hésite. Si Cary Elwes s’impose assez rapidement dans le rôle de l’héroïque Westley (sa performance dans Lady Jane a convaincu le réalisateur), la princesse Bouton d’or est moins simple à trouver. Après un casting organisé auprès de nombreuses comédiennes (parmi lesquelles Uma Thurman, Courteney Cox et Meg Ryan), Reiner et Goldman tombent finalement sous le charme de Robin Wright (alors héroïne récurrente du soap opéra Santa Barbara). Elle sera engagée une semaine seulement avant le début du tournage.

Le film commence au milieu des années 80, dans notre monde. Un petit garçon malade (Fred Savage), entouré de jouets et de l’affection des siens, se morfond dans son lit. Son grand-père (Peter Falk) lui rend visite. L’enfant s’apprête à écouter un de ces récits d’autrefois, principalement pour lui faire plaisir. Plus attiré par les aventures de super-héros que par les contes de fées, il écoute distraitement cette histoire d’une princesse tombant amoureuse d’un palefrenier que des pirates assassinent. Certes, ce démarrage est assez atypique, mais le petit garçon n’est pas passionné pour autant. Toutefois, petit à petit, insidieusement, le grand-père parvient à capter l’attention de son petit-fils. Inconsolable, la princesse accepte d’épouser un jeune prince arrogant. C’est alors qu’elle est kidnappée par un trio de brigands eux-mêmes pris en chasse par un redoutable pirate…

Un conte défait

Princess Bride ressemble à première vue à un conte de fées des plus conventionnels. Mais le spectateur comprend vite qu’il ne faut pas se fier aux apparences. Cette fausse fable candide et sirupeuse cache en réalité une comédie décalée, loufoque et atypique, jonglant en permanence entre le premier et le second degré. Autodérision, parodie, caricatures et gags ponctuent donc une histoire rocambolesque que l’on suit pourtant avec le même intérêt que si le récit était sérieux. En ce sens, notre identification avec l’enfant alité est totale. Rob Reiner joue à manipuler son spectateur, laissant toujours entrevoir la possibilité que – une fois n’est pas coutume – ce conte pourrait mal se terminer. Cary Elwes et Robin Wright s’amusent à détourner la mièvrerie qu’évoque de prime abord leur couple à l’écran. A leurs côtés, on se régale aussi de la prestation excessive de Mandy Patinkin, en escrimeur ibérique assoiffé de vengeance, et de la petite apparition de Billy Crystal, méconnaissable sous un maquillage de Peter Montagna et improvisant la grande majorité de ses dialogues. Soucieux d’une mise en forme soignée conforme à ce que les spectateurs attendent d’un conte de fées à l’écran, Reiner mise sur une direction artistique minutieuse et des effets spéciaux poétiques, à défaut d’être parfaits (le budget du film reste limité). On note ainsi des maquettes et des peintures sur verre de toute beauté, ainsi que l’insolite intervention de rats géants (en réalité des comédiens sous des costumes conçus par Nick Allder). La bande originale, signée Mark Knopfler, oscille entre les jolies balades à la guitare et les envolées synthétiques un peu ratées. Un orchestre et des instruments symphoniques auraient de toute évidence donné plus d’ampleur aux séquences épiques. Dommage aussi que l’histoire parallèle du grand-père et de l’enfant ne soit pas exploitée plus en profondeur, contrairement par exemple aux séquences de lecture de L’Histoire sans fin avec lequel Princess Bride entretient plusieurs similitudes. L’approche postmoderne du film ayant sans doute désarçonné une partie du public, Princess Bride ne connaît qu’un succès modeste au moment de sa sortie. Mais à l’aune des futurs succès populaires de Rob Reiner (Quand Harry rencontre Sally, Misery, Des hommes d’honneur), le film sera réévalué et deviendra culte, certaines de ses répliques entrant même dans la culture populaire.

 

© Gilles Penso

 

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