LES PROIES DU VAMPIRE (1957)

Une variante mexicaine sur le mythe du vampirisme avec un impressionnant German Robles qui servit d’inspiration au Dracula de la Hammer

EL VAMPIRO

 

1957 – MEXIQUE

 

Réalisé par Fernando Mendez

 

Avec Abel Salazar, Ariadna Welter, German Robles, Carmen Montejo, Jose Luis Jimenez, Mercedes Soler, Alicia Montoya

 

THEMA VAMPIRES

Le chaînon manquant entre le Dracula blafard et théâtral interprété par Bela Lugosi et celui, bestial et séducteur, incarné par Christopher Lee, ne se situe ni aux États-Unis ni en Grande-Bretagne mais au Mexique. Les Proies du vampire assure en effet une transition idéale entre l’épouvante expressionniste d’Universal et l’horreur graphique de la Hammer. Et si le comte vampire qui hante cette œuvre d’exception ne se nomme pas Dracula mais Duval, les références au texte de Bram Stoker sont légion. Ce qui n’empêche pas Fernando Mendez d’opter pour des variantes typiquement locales, comme cette magnifique hacienda embrumée remplaçant au pied levé les châteaux transylvaniens traditionnels. La jeune héroïne Marta (Ariadna Welter) part rendre visite à sa vieille tante malade. Personne n’acceptant de l’accompagner, le sympathique représentant de commerce Enrique (Abel Salazar) propose de faire un bout de chemin avec elle depuis la gare jusque dans le domaine familial, qui s’avère laissé à l’abandon depuis des lustres. Enrique est en réalité un médecin mandé par l’oncle Emilio (Jose Luis Jimenez), et il s’avère que la tâche qui l’attend est ardue, dans la mesure où deux vampires redoutables, se muant en chauves-souris à la nuit tombée, se sont mis en tête de récupérer la hacienda familiale pour y installer leur règne de terreur.

D’un point de vue strictement formel, Les Proies du vampire s’impose comme un des sommets de l’épouvante classique. La photographie noir et blanc somptueuse cultive l’héritage de Tod Browning et James Whale, allongeant plus que de raison les ombres portées et plongeant partiellement dans les ténèbres visages et décors, tandis que la partition de Gustavio Carrion nimbe le récit d’une atmosphère délicieusement envoûtante. Mais le film restera surtout dans les mémoires pour son couple de vampires, campés avec beaucoup de charisme par la glaciale Carmen Montejo, tout de noir vêtue, et surtout l’impérial German Robles, dont la haute stature, le regard sévère et les canines acérées inspireront largement le légendaire Cauchemar de Dracula.

« De la fin de la vie au début de la mort »

Recyclant habilement les codes du genre, le scénario de Ramon Obon se pare d’une poignée de répliques macabrement poétiques, notamment quand Duval évoque sa condition de suceur de sang noctambule ayant emprunté « cette étrange passerelle qui mène de la fin de la vie au début de la mort », ou encore lorsque la servante Maria met en garde Enrique contre la fatale morsure : « vous ne ferez pas de vieux os, et vous vivrez comme toutes ces âmes du purgatoire qui errent sans cesse sans que la mort les soulage ». Notons enfin le jeu habile des miroirs et de leurs reflets que la mise en scène de Fernando Mendez emploie à plusieurs reprises, soit pour révéler la nature immatérielle des vampires, soit pour prouver que les familles Duval et Lavud ne font qu’une (un « gimmick » qu’employait déjà Le Fils de Dracula avec le fameux Comte Alucard). Comme il se doit, le climax se déroule dans un grand brasier qui saura nettoyer la surface de la terre des vils suceurs de sang…  jusqu’au prochain épisode, bien entendu !

 

© Gilles Penso


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