LE CAUCHEMAR DE DRACULA (1958)

Le Bela Lugosi blafard et théâtral du studio Universal cède le pas à un Christopher Lee bestial aux crocs acérés et aux yeux injectés de sang

DRACULA / HORROR OF DRACULA

1958 – GB

Réalisé par Terence Fisher

Avec Christopher Lee, Peter Cushing, Michael Gough, Melissa Stibling, Carol Marsh, John Van Eyssen, Miles Malleson 

THEMA DRACULA I VAMPIRES I SAGA DRACULA DE LA HAMMER

Avant sa carrière cinématographique, Christopher Lee envisageait plutôt un avenir musical. C’est presque par hasard qu’il fut contacté par Terence Fisher, dont le flair infaillible avait vu là l’interprète idéal d’un Dracula moderne, à mille lieues de l’incarnation blafarde et théâtrale de Bela Lugosi. Un choix ô combien judicieux. Ce qui attira Lee semble avoir été entre autres la fidélité de l’histoire au texte de Bram Stoker, par la grâce d’un scénario signé Jimmy Sangster. Le récit commence en mai 1895. Jonathan Harker entre comme bibliothécaire dans le château du comte Dracula. En réalité, Jonathan est persuadé que Dracula est un vampire et il veut le démasquer pour mettre un terme à ses agissements. Lors de ses recherches, il se heurte à une femme-vampire et échappe de justesse à sa morsure. Mais il ne peut éviter celle du comte Dracula. Son ami, le docteur Van Helsing, s’inquiète alors de son silence. En découvrant son journal intime, il ne se fait plus d’illusion sur son sort peu avouable, qu’il annonce tristement à Lucy Holmwood, la fiancée de Jonathan. Or Lucy a été vampirisée par l’impitoyable Dracula. Avant que celle-ci ne soit définitivement ralliée à la cause du comte sanglant, Van Helsing s’adjoint les services d’Arthur, le frère de Lucy, et se met en chasse contre Dracula.

Dans le rôle du vampire, Christopher Lee est une révélation, aidé pour certains plans par des canines acérées  et des verres de contact injectés de sang (qui obstruaient complètement sa vue pendant le tournage, occasionnant quelques mémorables prises ratées !). Inspiré par le jeu de German Robles dans Les Proies du vampire, l’altier comédien anglais exhale une aura de fascination bestiale et quasi-érotique qu’aucun interprète n’avait jusqu’alors prêtée au personnage de Dracula. Alors qu’il fut l’année précédente un monstre de Frankenstein peu mémorable dans le pourtant magistral Frankenstein s’est échappé, Lee EST indiscutablement Dracula, retrouvant ici l’excellent Peter Cushing, aussi à l’aise en Van Helsing qu’il le fut en docteur Frankenstein. Leur affrontement final, musclé et dynamique, s’achève par une scène de décomposition anthologique, la Hammer étant également la première à montrer – en couleurs flamboyantes – l’horreur visuelle associée au mythe du comte vampire.

Une nouvelle génération de l'épouvante

La photographie et les décors étant somptueux, véritable marque de fabrique de la firme, et le reste du casting s’avérant très convainquant (avec Michael Gough faisant là ses premiers grands pas dans le cinéma d’épouvante), ce Dracula novateur ouvrit une grande brèche dans ce qu’il conviendra d’appeler une nouvelle génération du cinéma fantastique. Quant à la partition tonitruante de James Bernard, elle est encore dans toutes les mémoires des fantasticophiles. Face à la qualité du résultat et à l’accueil enthousiaste du public, Universal, qui avait presque cédé à contre-cœur à la Hammer les droits de Frankenstein et Dracula, n’hésita plus une seconde et proposa à la firme anglaise de racheter tous les autres monstres de son riche patrimoine. Christopher Lee, quant à lui, se drapera à nouveau de la cape de Dracula pour six autres films estampillés Hammer.

© Gilles Penso

Partagez cet article