LA GORGONE (1964)

Peter Cushing et Christopher Lee font face à un monstre mythologique dans ce conte fantastique signé Terence Fisher…

THE GORGON

 

1964 – GB

 

Réalisé par Terence Fisher

 

Avec Barbara Shelley, Peter Cushing, Christopher Lee, Richard Pasco, Prudence Hyman, Michael Goodliffe, Patrick Troughton

 

THEMA MYTHOLOGIE

Au milieu des années soixante, les studios Hammer ont déjà bien exploité le filon des monstres classiques d’Universal, notamment Dracula, Frankenstein, la Momie et le Loup-Garou. Même si ces créatures immortelles séviront encore pendant une bonne dizaine d’années sous les bons auspices de la firme britannique, celle-ci se met en quête de nouvelles sources d’inspiration, histoire de renouveler un peu son bestiaire. D’où la mise en scène de la Gorgone, un monstre femelle tiré de la mythologie grecque, que Terence Fisher et son équipe s’efforcent de transporter dans le contexte britannique victorien cher aux productions Hammer. « Parmi les films que j’ai réalisés, il y a en a beaucoup que je n’aime pas, mais je dois avouer être très fier de La Gorgone parce qu’il s’appuie plus sur la poésie et le fantastique que sur l’horreur », affirmait à l’époque le réalisateur (1). Le scénariste John Gilling se révèlera moins enthousiaste quelques années plus tard, chagrin que l’auteur et producteur Anthony Hinds ait réécrit toute la scène d’introduction. « Il a changé une grande partie du dialogue et a massacré ce qui, à mon avis, aurait pu être un très bon film », déclarait-il (2). Sans être aussi sévère que Gilling, nous aurions effectivement tendance à constater que le potentiel de La Gorgone n’est pas exploité à son maximum, malgré ses grandes qualités.

Nous sommes au début des années 1900. Lorsque son père et son frère meurent dans des circonstances mystérieuses, Paul Heitz (Richard Pasco) se rend dans une petite ville pour comprendre ce qui se passe. Il constate rapidement que les villageois se méfient des étrangers et vivent dans la peur d’une sorte de malédiction, tout particulièrement les nuits de pleine lune. Ces craintes seraient liées à la légende de Megara, une Gorgone si hideuse qu’il suffit de la regarder pour être transformé en pierre. Bientôt, notre homme fait la rencontre de deux éminents professeurs campés par les deux stars de la compagnie Hammer, en l’occurrence Christopher Lee et Peter Cushing. Le premier joue l’excentrique Karl Meister, qui cherche à percer le mystère de la région. Le second incarne Namaroff, un homme qui semble en savoir plus qu’il n’en dit et dont le comportement très possessif à l’égard de sa jeune assistante Carla Hoffman (Barbara Shelley) semble cacher quelque chose…

« Elle est libre, désormais… »

La Gorgone regorge de séquences fortes (la transformation progressive d’un homme en statue de pierre, les panoramas du vieux château gothique dont la maquette servit également dans L’Empreinte de Frankenstein), mais il faut bien avouer que le look du monstre vedette, interprété par Prudence Heyman, n’a rien de bien convaincant. Malgré les astuces de mise en scène de Terence Fisher (via des jeux de reflets dans l’eau ou dans un miroir déformant), le maquillage est très sommaire et les serpents en plastique qui remuent mollement sur sa tête sont plus risibles qu’effrayants. Barbara Shelley avait pourtant proposé au producteur Anthony Nelson Keys de jouer elle-même la Gorgone et de porter une perruque spéciale agrémentée de vrais serpents, mais cette idée fut rejetée à cause des complications techniques qu’elle laissait augurer. Bien sûr, face au résultat final, Keys admit qu’il aurait dû écouter son actrice principale. Christopher Lee se fendra à ce propos d’une remarque cinglante : « La seule chose qui ne va pas dans La Gorgone, c’est la Gorgone ! » Il n’empêche que c’est lui qui a droit à la réplique finale, après avoir enfin vaincu la créature victime d’un sort funeste. « Elle est libre, désormais… », dit-il tristement. Lors de sa sortie, le film fut exploité en double programme avec Les Maléfices de la momie.

 

(1) Extrait d’un entretien avec Michael Caen publié dans « Midi Minuit Fantastique » en décembre 1964.

(2) Extrait d’un entretien publié dans « Little Shop of Horrors » en avril 1978.

 

© Gilles Penso


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