MISSION: IMPOSSIBLE – THE FINAL RECKONING (2025)

Dans cette suite directe du précédent volet, Ethan Hunt joue contre la montre pour empêcher un holocauste nucléaire…

MISSION : IMPOSSIBLE – THE FINAL RECKONING

 

2025 – USA

 

Réalisé par Christopher McQuarrie

 

Avec Tom Cruise, Hayley Atwell, Ving Rhames, Simon Pegg, Esai Morales, Henry Czarny, Pom Klementieff, Rolf Saxon, Angela Bassett

 

THEMA ESPIONNAGE ET SCIENCE-FICTION I SAGA MISSION IMPOSSIBLE

Ce huitième chapitre des aventures d’Ethan Hunt a la particularité de former un dyptique avec Mission : Impossible – Dead Reckoning, partie 1 sorti en 2023. Pourtant, suite à des résultats au box-office en deçà des attentes, la Paramount a pris la décision de ne pas l’intituler « partie 2 », lui préférant ce Final Reckoning, qui évitera à la fois de décourager les spectateurs ayant fait l’impasse sur le précédent et en attirera d’autres en suggérant qu’il pourrait s’agir de l’ultime volet de la saga initiée en 1996, en jouant même sur l’éventualité d’une fin tragique pour notre héros casse-cou. Après tout, même James Bond a fini par tirer sa révérence… The Final Reckoning entend donc reprendre les affaires là où nous les avions laissées deux ans auparavant. Hélas, ce qui aurait dû permettre de commencer sur les chapeaux de roue s’avère en fait un frein à l’action : afin de ne perdre personne en route, on nous offre d’entrée de jeu un résumé en bonne et due forme, à la façon d’un épisode de série TV (les fameux « previously on »). Dans le film précédent, nous déplorions l’aspect trop didactique des dialogues. Le reproche vaut toujours et les choses ont même empiré puisque McQuarrie ajoute cette fois de réguliers flashbacks (de tous les films, sauf le second) en mode « best of Tom Cruise ». Plus ennuyeux encore, cette exposition parvient à simplifier les enjeux présumés complexes du déjà très long épisode précédent, à savoir : Ethan Hunt a mis la main sur les deux morceaux d’une clé permettant d’accéder au code original de l’Entité (l’Intelligence artificielle qui menace la survie de l’humanité), laquelle se trouve dans l’épave d’un sous-marin nucléaire gisant au fond de l’océan arctique. Beaucoup de bruit pour rien sur le plan dramatique ! La mission dEthan Hunt, « sil laccepte », consiste donc à récupérer le disque dur contenant lEntité puis den décharger le contenu dans un serveur situé en Afrique du Sud le programme sera à jamais prisonnier hors-ligne.

Bien sûr, le chemin sera parsemé d’embûches, et si McQuarrie avait réussi dans Rogue Nation et Fallout à écrire des scènes d’action aussi imaginatives que spectaculaires, il s’applique avant tout ici à relier les points d’un dessin dont on devine très vite les contours, maitrisant parfaitement le concept de la loi de Murphy afin que les complications et retournements de situation surviennent toujours au moment opportun, créant par là-même un suspense très artificiel. Une critique applicable en particulier au morceau de bravoure sous-marin à mi-parcours : à moins d’être ablutophobe, difficile en effet de craindre pour la vie d’Ethan Hunt, d’autant que les qualités d’apnéiste de son interprète sont amenuisées par des coupes régulières au montage et que la scène, tournée dans un décor immergé en studio, ne se distingue pas forcément de ce qu’on a pu voir par exemple dans Demain ne meurt jamais. Pire encore, la fameuse scène du biplan, sur laquelle reposait toute la promotion de Final Reckoning, est certes absolument dingue à l’écran (le format IMAX ajoute beaucoup au spectacle) mais… elle semble appartenir à un autre film : tranchant sur le plan visuel avec tout ce qui a précédé, qui se voulait sombre et claustrophobe, voilà que le climax nous emmène virevolter dans un ciel azur sans nuages au-dessus de paysages verdoyants paradisiaques détournant presque l’attention de l’action, d’autant que l’on a plutôt l’impression d’assister à un show aérien et quEthan Hunt semble s’escamoter au profit de la star Tom Cruise. Une entame de la suspension d’incrédulité accentuée par toutes les vidéos promos qui inondaient la toile plusieurs mois avant la sortie du film et dans lesquelles l’acteur aux mâchoires de fer, à trop vouloir montrer qu’il conservait tout son « cool », même accroché à une aile d’avion, a fini par quelque peu démystifier lui-même ses propres exploits.

 MI-8 : MI-figue, MI-raisin

S’agissant présumément du dernier Mission Impossible en raison de son titre quelque peu roublard, McQuarrie et Cruise cherchent à orchestrer le point d’orgue de la saga et convient tous les anciens à la fête. On retrouve ainsi Angela Bassett, promue ici au rang de présidente des États-Unis (une prédiction ratée de l’élection de Kamala Harris ?), mais après Henry Czerny, le retour d’un autre personnage très secondaire du film original laisse quelque peu perplexe. Cette volonté de raccrocher tous les wagons s’avère encore une fois aussi artificielle qu’inutile pour un film déjà (trop) long. Paradoxalement, McQuarrie développe certains personnages qui n’en demandaient pas tant, alors qu’aucune mention n’est faite d’Ilsa (Rebecca Ferguson), disparue dans l’épisode précédent et remplacée au pied levé par Grace (Haley Atwell) dans le cœur d’Ethan Hunt, sans que cela ne surprenne grand-monde. Même le méchant Gabriel (Essai Morales) passe la majeure partie du temps sur la touche et ne semble avoir été retenu que pour offrir un adversaire à Ethan Hunt lors de la scène finale. Étrange également que le fait qu’il ait tout de même tué la première petite amie de ce dernier ne semble plus vraiment être au centre de leur antagonisme. Où est passé le scénariste rigoureux de Usual Suspects, Way of the Gun ou Jack Reacher ? Et que dire de ces tunnels de dialogue où chaque personnage se livre chacun son tour à une petit monologue théâtral et prophétique, même en présence d’une bombe menaçant d’exploser d’une seconde à l’autre ? Quant à McQuarrie-réalisateur, il opère là encore des choix surprenants en rappelant parfois l’ambiance des adaptations des romans de Tom Clancy (la franchise Jack Ryan) mais en reprenant aussi une esthétique évoquant les productions Bruckheimer, voir notamment ces images apocalyptiques de missiles nucléaires fondant sur les monuments iconiques des grandes capitales que Michael Bay n’aurait pas reniées, mais aussi les scènes dans le centre de contrôle de l’armée ou ces plans de porte-avion américain. The Final Reckoning ne retrouve jamais l’équilibre subtil entre grand spectacle et scénario au cordeau qui faisait tout le sel de Rogue Nation et Fallout. On regrettera particulièrement la pirouette commerciale consistant à avoir scindé l’histoire en deux, là où un seul film délesté de certains dialogues et personnages secondaires se serait avéré plus dense et digeste. McQuarrie continue de servir l’image et l’ego de son acteur/producteur, au détriment de l’intégrité du film. Il était question à l’origine que chaque film soit réalisé par un réalisateur différent qui apporterait sa sensibilité et son style, mais Tom Cruise en aura finalement décidé autrement. Il est pourtant probablement temps d’apporter un regard neuf sur la franchise, qui pourrait commencer à ressembler à une variante de Fast & Furious par certains aspects, en particulier la place un brin vaniteuse que s’y s’accorde leur star principale.

 

 © Jérôme Muslewski

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