DRAGONS (2025)

Le co-réalisateur du splendide film d’animation Dragons le réinvente en prises de vues réelles pour lui donner un second souffle…

HOW TO TRAIN YOUR DRAGON

 

2025 – USA

 

Réalisé par Dean DeBlois

 

Avec Mason Thames, Nico Parker, Gerard Butler, Nick Frost, Gabriel Howell, Julian Dennison, Bronwyn James, Herry Trevaldwyn, Murray McArthur, Peter Serafinowicz

 

THEMA DRAGONS I HEROIC FANTASY I SAGA DRAGONS

Pour le réalisateur Dean DeBlois, l’année 2025 prend une tournure étrange. Coup sur coup, deux des films d’animation qu’il a co-écrits et co-réalisés, Lilo & Stitch et Dragons, ressuscitent sur les écrans sous forme de longs-métrages « live » mêlant les images de synthèse et les prises de vues réelles. S’il laisse à Dean Fleischer Camp le soin de réinterpréter Lilo & Stitch, DeBlois se charge lui-même du remake de Dragons. « Universal m’a précisé que l’histoire devait être la même, mais en l’embellissant au maximum », raconte-t-il. « Ils voulaient explorer sa mythologie, approfondir les personnages, la rendre plus mature, tout en adoptant une approche plus viscérale et plus immersive. J’ai répondu que si ce film devait se faire, c’était à moi de m’en charger, parce que je savais où se trouvait le cœur du récit. Je voulais préserver l’intégrité du film original et satisfaire les fans » (1) DeBlois fixe tout de même ses conditions : s’il doit réinventer l’un de ses plus gros succès, il souhaite une liberté créative totale. Pour reproduire en prises de vues réelles les somptueux panoramas de Dragons, l’équipe de tournage part s’installer à Belfast pendant plusieurs mois. Richard Deakins, consultant visuel du film original, déclinant l’invitation de réitérer son travail sur ce remake, c’est le directeur de la photographie Bill Pope (Matrix, Alita : Battle Angel) qui en signe finalement les images.

Il ne faut pas longtemps pour constater que Dragons est une éclatante réussite formelle. Le film s’impose sans effort sur le podium des meilleures adaptations live de films d’animation, toutes époques confondues, reléguant loin derrière lui Le Livre de la jungle, La Belle et la Bête ou Mulan, pourtant parmi les tentatives les plus abouties de Disney dans le genre. Les extérieurs naturels sont splendides, les redesigns réalistes des différents dragons impressionnants, et le casting humain convainc largement. Mention spéciale à Gerard Butler, qui reprend avec le même mordant et la même autorité le rôle du chef viking qu’il incarnait déjà vocalement quinze ans plus tôt. Mais le véritable défi en ce domaine était de trouver un acteur capable d’incarner Harold/Hiccup sans trahir l’essence du personnage. Or le choix de Mason Thames s’avère une excellente trouvaille. Le jeune comédien restitue avec justesse la fraîcheur, la maladresse et la candeur de son alter ego animé.

Remake ou clone ?

Derrière cette réussite se glisse pourtant un certain malaise. En reprenant presque plan par plan le découpage du film de 2010, et en reproduisant fidèlement chacun de ses dialogues, Dragons version 2025 ne se présente pas comme un simple remake, mais comme un quasi-clone. Et si, au-delà de l’évidente motivation commerciale – faire fructifier une franchise par tous les moyens – , Universal envisage cette nouvelle version comme une « amélioration » de l’original, cela suggère une idée perturbante selon laquelle l’animation ne serait qu’un brouillon, une étape préliminaire à une version en prises de vues réelles considérée comme plus aboutie. Une telle démarche reviendrait à nier la légitimité de l’animation en tant que langage artistique autonome, avec ses codes, sa poésie, sa puissance visuelle propre – un art qui n’a jamais eu besoin du « live » pour exister ou s’accomplir. Paradoxalement, la question ne se poserait pas avec autant d’acuité si le film était raté. Mais en l’état, Dragons nous donne presque l’impression d’avoir trouvé sa forme définitive, ce qui a pour effet fâcheux de dévaloriser son prédécesseur – voire de le muer en une sorte de vulgaire animatique. En attendant de pouvoir trancher ce débat épineux, la meilleure attitude reste probablement de profiter des deux films et de les apprécier conjointement comme deux facettes d’un même joyau.

 

(1) Extrait d’une interview parue dans Business Insider en juin 2025

 

© Gilles Penso

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