

Commencé en 2005, achevé 20 ans plus tard, ce petit film d’horreur met en scène Tony Todd dans le rôle d’un chirurgien féru d’expériences bizarres…
CUTTER’S CLUB
2025 – USA
Réalisé par Charles Band
Avec Tony Todd, Melissa Searing, Davee Youngblood, Raelyn Hennessee, Jemal McNeil, David Sean Robinson, Jon Simanton
THEMA MÉDECINE EN FOLIE I PETITS MONSTRES I SAGA CHARLES BAND
L’acteur Tony Todd est décédé en 2024, le créateur d’effets spéciaux John Buechler en 2019, le directeur de la photographie Mac Ahlberg en 2012. Pourtant, tous les trois sont au générique de Cutter’s Club, diffusé sur la plateforme de Full Moon Entertainment en mai 2025. Comment expliquer un tel prodige ? Rien de surnaturel ou d’alchimique là-dedans. La raison est beaucoup plus triviale. En 2005, le producteur et réalisateur Charles Band entame à Los Angeles le tournage de ce petit film d’horreur au budget extrêmement modeste. Contrairement à la majorité des « direct-to-video » produits à la chaîne par Full Moon à l’époque, le film n’est pas tourné au format vidéo mais en 35 mm. Hélas, au bout de sept jours, l’argent vient à manquer et le film est laissé en plan. Un an plus tard, alors qu’il a pu lever le financement nécessaire, Charles Band apprend avec désarroi que le négatif a été égaré par le laboratoire. Cutter’s Club aurait pu rester coincé dans les limbes de l’oubli, au milieu d’autres films inachevés condamnés à ne jamais voir le jour. Mais vingt ans plus tard, le négatif perdu est miraculeusement retrouvé et restauré. Band achève enfin cette œuvrette qui devient donc le film-testament posthume de Todd, Buechler et Ahlberg.


Cutter’s Club s’intéresse à un couple d’étudiants en médecine. Jill Stevenson (Melissa Searing) et son petit ami Jack Louis (Davee Youngblood). Major de sa promo, Jill pratique en douce des expériences dans un bâtiment désaffecté pour s’exercer. Son mentor est le docteur George Roberts (Tony Todd), un savant brillant mais très instable, rejeté par l’université à cause de ses théories excentriques et de son caractère imprévisible. Troublé par sa première rencontre avec cet homme très bizarre, Jack accepte d’assister Jill dans une de ses expériences et tous deux parviennent ainsi à ramener un chat à la vie. Mais bientôt, ils se retrouvent confrontés à une société secrète baptisée « The Cutter’s Club » (« le club des coupeurs »). Leur credo : exploiter la chirurgie au-delà de son usage réparateur ou esthétique traditionnel pour pratiquer ce qu’ils appellent « l’art de la chair ». Ces docteurs Maboul, qui ont sans doute trop vu de films de David Cronenberg, jouent ainsi aux apprentis-sorciers en transplantant des organes empruntés à différents animaux pour concevoir de nouvelles formes de vies. Et c’est l’excentrique George Roberts qui dirige ce petit groupe d’exaltés.
L'art de la chair
L’atmosphère générale de Cutter’s Club évoque celle de Re-Animator, dont Charles Band cherche visiblement à retrouver le grain de folie malgré les moyens ridicules à sa disposition. Mais la pauvreté et la banalité des décors, alliées à un jeu d’acteur pas franchement convainquant, jouent clairement en défaveur du film. Tony Todd lui-même en fait des caisses, dans le rôle de ce scientifique hyperactif, capable d’écrire des deux mains à la fois, au milieu de ses carnets de notes épars et de ses triples paires de lunettes. Secoué de violentes sautes d’humeur, il parle tout seul, comme si Charles Band lui avait donné comme seules instructions : « ton personnage est fou, débrouille-toi avec ça. » Le premier cobaye qui apparaît dans le film est une sorte de rat mutant aux dents hypertrophiées (une marionnette bricolée à bas prix). Nous apercevons également une main velue qui attaque furtivement Jack. Mais le clou du spectacle est une créature simiesque qui arbore deux têtes squelettiques. « Mon chef d’œuvre ! » dit fièrement Roberts en l’exhibant. Voilà encore un de ces petits monstres dont raffole Band, une sorte de croisement entre les freaks en bocaux de Hideous et les petits squelettes grimaçants de Skull Heads. Le design de cet être bicéphale est assez frappant, mais sa peau fleure bon le caoutchouc et son animation reste très sommaire. Pour rythmer son film – dont l’intrigue se résume à peu de choses -, Band place régulièrement dans son montage des images de pleines lunes, comme s’il ressentait le besoin de rappeler à tout le monde le nom de sa compagnie. Après à peine un peu plus d’une heure de métrage, Cutter’s Club s’arrête de manière abrupte, sur un cliffhanger qui semble vouloir appeler une suite. Mais sans Todd en tête d’affiche, la perspective d’un second épisode nous semble très peu probable.
© Gilles Penso
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