PROMPT (2025)

Une jeune spécialiste de la génération de vidéos par intelligence artificielle se retrouve hantée par un visage inconnu qui apparaît sur ses écrans…

PROMPT

 

2025 – USA

 

Réalisé par Charles Band

 

Avec Lilly Bell, Elliott Woods, Jax Cody, Ian S. Peterson, Llana Barron, Rib Hillis, Jessica Morris, Felix Merback

 

THEMA MONDES VIRTUELS ET PARALLÈLES I SAGA CHARLES BAND

L’intelligence artificielle alimentant toutes les conversations de manière de plus en plus enflammée, surtout depuis le lancement de Chat GPT en novembre 2022, Charles Band décide d’aborder le sujet assez tôt en réalisant AIMEE : The Visitor, qui mue une sympathique assistante virtuelle en redoutable serial killer. Dans la foulée, il sollicite l’IA générative pour créer les visions cauchemardesques de Quadrant. Évidemment, il y a encore mille histoires à raconter autour d’un thème si complexe. D’où la mise en chantier de Prompt, que Band tourne à Los Angeles pendant quelques jours avec une poignée de comédiens, fidèle à son légendaire sens de l’économie. De prime abord, ce film minimaliste semble n’utiliser son argument de science-fiction que comme prétexte à une succession de séquences érotiques destinées à titiller un public majoritairement masculin, dans la droite lignée des innombrables titres du catalogue Surrender Cinema. Mais le scénario de J.P. Talbot ne se limite pas à un assemblage de vignettes grivoises : il interroge notre rapport aux vidéos générées artificiellement et le regard biaisé qu’elles peuvent nous amener à porter sur le monde et sur nous-mêmes. Certes, la réflexion philosophique demeure sommaire, mais Prompt n’en soulève pas moins plusieurs questions passionnantes.

Conscient de devoir engager une actrice peu freinée par des soucis pudeur, Charles Band confie le rôle principal à Lilly Bell, véritable stakhanoviste du film X – plus de 130 titres en six ans – qui s’est déjà offert quelques détours plus « traditionnels », comme le slasher Scissors. Ici, la jolie blonde ne doit pas se contenter de donner de sa personne physiquement, puisqu’elle déploie aussi une tessiture de jeu subtile qui permet aux spectateurs d’entrer en empathie avec elle et d’adhérer plus facilement à cette histoire étrange. Bell incarne Taylor, une talentueuse conseillère en communication digitale qu’une cliente contacte pour l’aider à promouvoir leur dernier produit : une application diseuse de bonne aventure, « TheFortuneTeller.com » (le site web existe vraiment, essayez et vous verrez !). Taylor propose de générer en IA une influenceuse qui défend les vertus du produit, à la grande joie de ses commanditaires qui adorent l’idée. Les délais sont très courts, mais Taylor a déjà tout créé la veille. Il lui reste donc du temps pour elle. Esseulée, elle génère en IA quelques films érotiques afin de tromper son ennui. L’effet se révèle très efficace sur sa libido, mais le visage d’un homme mystérieux apparaît furtivement dans ses vidéos. De plus en plus troublée, elle commence à développer une obsession pour cet inconnu qui surgit systématiquement dans ses prompts et semble la dévorer des yeux…

Qui regarde qui?

Le budget riquiqui de Prompt n’empêche pas Band de soigner sa mise en forme, sollicitant Jonathan Walker (Bring Her to Me, Quadrant, Death Streamer) pour composer une bande originale envoûtante à base de synthétiseurs et de chœurs échantillonnés, tout en confiant à Terrance Ryker (Skull Heads, The Dead Want Women, Reel Evil) la photographie élégante du film. Quelques clins d’œil pour connaisseurs ponctuent discrètement le métrage, notamment la sollicitation de deux habitués des séries B fantastiques, l’actrice Jessica Morris (Les Geôles du diable) et son époux Rib Hillis (Killbots) dans le rôle des clients, ou encore la réutilisation du prénom Aimee. Mais Prompt reste un film sérieux qui s’appréhende au premier degré, loin des délires potaches d’un Evil Bong. Le scénario finit d’ailleurs par construire un vertigineux jeu de mise en abîme. L’héroïne est en effet observée par un homme virtuel qui s’invite dans ses créations et se met à influer sur son comportement, alors que c’est logiquement le contraire qui devrait se produire. Et lorsque, toute émoustillée, elle s’apprête à se déshabiller devant lui en lui demandant s’il aime ce qu’il est en train de voir, elle regarde la caméra… et donc les spectateurs. Ce triple croisement de points de vue débouche sur la question au cœur de tous les enjeux du film : qui regarde qui ? Certes, le twist final est prévisible, mais il reste savoureux et n’aurait pas dépareillé dans un épisode de La Quatrième dimension… ou plutôt de Black Mirror.

 

© Gilles Penso

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