AUX FRONTIERES DE L’AUBE (1987)

Kathryn Bigelow réinvente le mythe du vampirisme en puisant dans l'imagerie du western spaghetti

NEAR DARK

1987 – USA

Réalisé par Kathryn Bigelow

Avec Jenny Wright, Adrian Pasdar, Lance Henriksen, Bill Paxton, Jenette Golstein, Joshua Miller, Marcie Leads

THEMA VAMPIRES

Aux frontières de l’aube représente une étape importante dans la mesure où il propose un renouveau total du thème du vampirisme. Dès lors, les films abordant le mythe allaient se diviser en deux catégories : les « classiques » et les « modernes ». Certes, la démarche n’est pas inédite, et quelques œuvres phares comme Martin ou Soif de sang posaient déjà les jalons d’une approche hyper-réaliste des buveurs de sang, sans capes ni dents longues. Mais l’œuvre de Kathryn Bigelow a marqué les mémoires par son esthétisme magnifique et ses idées foisonnantes. Alors qu’il traîne en ville, Caleb Colton (Adran Pasdar), un jeune homme aux allures de cow-boy moderne, remarque une jeune fille qu’il tente d’aborder. Au fur et à mesure que la nuit s’étire, elle se fait de plus en plus mystérieuse. Son baiser se transforme en morsure. À l’aube, elle s’enfuit. Le jeune homme découvre alors son nouvel état… c’est un vampire ! Sauf que ce mot n’est jamais prononcé au cours du film, et que la trouvaille visuelle se passe de tout commentaire : tandis que le soleil se lève dans le ciel, le jeune homme faiblit, sa peau brunit et son corps exhale une fumée croissante…

Car ici, les vampires exposés au soleil sont victimes de douloureuses combustions spontanées, qui peuvent s’achever par de spectaculaires explosions incandescentes. John Carpenter s’en souviendra sans doute lorsqu’il réalisera son Vampires. Conscient qu’il vient d’être « converti » malgré lui au monde des non-morts, Caleb n’a plus qu’une alternative : rejoindre la jeune fille et le groupe de vampires auquel elle appartient, une bande de desperados crasseux et noctambules qui traversent les grands espaces de l’Oklahoma dans un van aux fenêtres soigneusement occultées pour éviter la lumière du soleil. Le film prend alors les allures de western sombre et violent, émaillé de séquences choc comme l’attaque sanglante du bar, et de véritables morceaux d’anthologie, notamment l’embuscade dans la chambre d’hôtel au cours de laquelle chaque impact de balle tirée par la police trace un rai de lumière qui menace de brûler la peau des hors-la loi vampires. 

Un air de famille avec James Cameron

Aux frontières de l’aube reflète aussi plus que tout autre film les similitudes entre les univers de Kathryn Bigelow et James Cameron, dont elle fut à l’époque l’égérie. Ce parallélisme s’affirme par le choix des comédiens, avec en tête un Lance Henriksen impérial et un Bill Paxton surexcité, par le choix d’une musique 100% synthétique, signée ici Tangerine Dream, et par certaines séquences clefs, notamment la poursuite en semi-remorque qui présente d’indéniables ressemblances avec celle de Terminator. Bref, Aux frontières de l’aube est une indiscutable réussite visuelle, narrative, dramatique et émotionnelle, qui se paye en plus le luxe d’offrir pour la première fois un remède imparable contre le vampirisme : une transfusion sanguine ! Il fallait y penser… Signe des temps, comme la plupart des œuvres « modernes » des années 80, le film de Bigelow est très marqué par l’époque à laquelle il fut réalisé, paré désormais d’une patine indélébile.

 


© Gilles Penso

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