LE DÉCLIC (1985)

Grâce à une télécommande de son invention, un homme réveille la libido d’une femme qu’il convoite…

LE DÉCLIC

 

1985 – FRANCE

 

Réalisé par Jean-Louis Richard

 

Avec Jean-Pierre Kalfon, Florence Guérin, Bernie Kuby, Géraldine Pernet, Jacqueline Chauvet, Corinne Corron, Gérard-Antoine Huart, Fabrice Josso

 

THEMA MÉDECINE EN FOLIE

L’intérêt majeur du Déclic tient à trois choses : une idée de départ joyeusement excentrique, le magnétisme froid de Jean-Pierre Kalfon et les charmes impudiques de Florence Guérin. Il n’y a pas là de quoi en faire un grand film, certes, ni même une œuvre très mémorable. Mais voilà qui justifie tout de même le visionnage distrait de cette curiosité effrontément « eighties ». À l’origine se trouvent les quatre tomes d’une bande-dessinée en noir et blanc que ce polisson de Milo Manara dessine dans les années 80. Les scénarios de la BD s’appuient sur un argument de science-fiction prétexte à de folles dérives érotiques, discipline dans laquelle Manara excelle depuis la fin des années 60, notamment sous l’influence du « Barbarella » de J.C. Forest. Un an après leur publication, les albums sont donc adaptés sous forme d’un film, face à la caméra de Jean-Louis Richard, ex-comédien (A bout de souffle, Jules et Jim, La Peau douce, Le Dernier métro) et scénariste (Fahrenheit 451, La Mariée était en noir, La Nuit américaine) très attaché à la Nouvelle Vague. En rédigeant en 1974 le scénario d’Emmanuelle, Richard révèle d’indiscutables accointances avec le genre érotique qu’il va décliner en dirigeant une décennie plus tard ce fameux Déclic, son quatrième long-métrage.

Les traits taillés à la serpe, le regard de biais, la voix traînante, Jean-Pierre Kalfon incarne le docteur Fedorovich, alias Fez, bras droit de Christiani (Bernie Kuby), un homme d’affaires mafieux qui sévit en Louisiane. Fez n’aime pas beaucoup son employeur, qui le traite lui-même avec un certain mépris. L’épouse du mafieux, la ravissante Claudia (Florence Guérin), considère elle-même Fez avec une arrogance hautaine qui lui déplaît fortement. N’y tenant plus, il décide de se venger. Dans un petit laboratoire d’électronique, notre homme bricole une télécommande d’un genre très spécial qui permet d’éveiller de manière brutale la libido de la personne qui y est soumise après avoir été préalablement mise sous hypnose. Fez choisit bien sûr Claudia comme cobaye. Désormais, chaque fois qu’il active le déclic, cette femme du monde bien sous tous rapports se transforme en redoutable nymphomane que rien ne semble pouvoir réfréner…

Tu ris, tu pleures

Dès les premières minutes, Kalfon nous accompagne avec sa voix off désabusée, façon héros de film noir, et pousse même la chansonnette à l’occasion du titre « Tu ris, tu pleures » qu’il interprète en début et en fin de métrage (le single de la chanson sera exploité en 45 tours au moment de la sortie du film). Son jeu « autre » et sa présence inimitable dotent d’emblée Le Déclic d’une tonalité singulière. Mais l’atout majeur du long-métrage de Jean-Louis Richard est bien sûr Florence Guérin. Cette dernière excelle dans le registre de la bourgeoise glaciale qui se mue subitement en bête de sexe insatiable et agressive dès que Fez actionne sa machine infernale. Les scènes érotiques qui s’ensuivent ne se départissent jamais du second degré propre au comique des situations dans lesquelles elles s’insèrent. Ainsi, les ébats lascifs de Claudia dans une cabine d’essayage de grand magasin, face à un prêtre paniqué, devant un majordome peu farouche ou au milieu des bayous ne se contentent pas de titiller la libido du spectateur mâle. Ils ont aussi vocation de provoquer le rire. Mais passé l’effet de surprise, Le Déclic commence à patiner, multipliant les sous-intrigues qui ne mêlent nulle part (les malversations de Christiani, le futur anniversaire de la nièce d’un de ses associés) pour combler le vide narratif. Le passage du dessin à l’écran n’est donc qu’à moitié convaincant, Manara reprenant la place de choix qui lui revient au cours du générique de fin qui égrène quelques-unes des plus belles planches de ses albums.

 

© Gilles Penso


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