LA COLLINE A DES YEUX (1977)

Wes Craven nous raconte sans concession le choc violent entre la civilisation et la sauvagerie la plus primaire

THE HILLS HAVE EYES

1977 – USA

Réalisé par Wes Craven

Avec Susan Lanier, Robert Houston, Martin Speer, Dee Wallace Stone, James Whitworth, Russ Grieve, Michael Berryman

THEMA TUEURS I CANNIBALES I SAGA LA COLLINE A DES YEUX WES CRAVEN

Fidèle aux thématiques qu’il développa dans La Dernière maison sur la gauche, lesquelles furent reprises avec brio par John Boorman dans Délivrance, Wes Craven continue de s’intéresser à la violence humaine poussée à son paroxysme, avec cette mémorable Colline à des yeux (quel titre magnifique !) dont il signa le scénario, la réalisation et le montage. Une famille américaine, dont la mère est croyante et le père ex-policier, quitte Cleveland pour la Californie dans une caravane tirée par un break, en direction d’une mine d’argent dont ils viennent d’hériter. Les parents, les deux filles, le fils, le gendre, un bébé et deux chiens-loups traversent donc le désert, au cours de ce qui semble s’apparenter de prime abord à un road movie initiatique. Lorsque l’essieu de la voiture se brise, ils se retrouvent isolés en plein Arizona face à une famille dégénérée vivant dans la colline. Le père, Jupiter, est un mutant victime d’une expérience atomique, sa femme est une corpulente ex-prostituée, ses enfants sont Pluton, Mars, Mercure et Ruby. Anthropophages, ils communiquent avec des radio CB volées. La famille de la colline décime les intrus et capture le bébé pour le dîner. Les survivants et le dernier chien vivant sont alors décidés à se venger…

Au cours de cet éprouvant « survival », Le spectateur suit ainsi les mésaventures de deux familles parfaitement antithétiques : l’une « normale », équilibrée, citadine, mais intruse en plein désert ; l’autre sauvage, cannibale, affamée et violée sur son propre territoire. Les membres de la première famille ne forçant pas spécialement la sympathie, le spectateur se trouve d’emblée sur un terrain glissant, dénué de pôles d’identification. Lorsque les rejetons de Jupiter répondent à l’envahissement de leur terre par l’agression nocturne de la caravane, le film bascule dans une violence inouïe, traitée avec une crudité décuplant son efficacité, ceci malgré un jeu d’acteurs assez approximatif. Ce bain de sang, qui semble partiellement s’inspirer de Massacre à la tronçonneuse, laisse pantois. Mais l’enthousiasme avec lequel les agressés, à bout de nerfs, finissent par rendre les coups, amplifie encore le malaise.

Monstruosités familiales

Car là est bien le propos de Craven. La violence, la folie meurtrière et la haine bestiale sont dangereusement communicatives. Le final abrupt, une fois cet affolant axiome démontré, ne prend dès lors même plus la peine d’épiloguer, laissant le spectateur sur les rotules. « Dans pratiquement tous mes films, j’aime développer l’idée que la monstruosité peut naître chez les individus les plus normaux et que la violence est susceptible de se développer au sein des relations familiales », nous explique Wes Craven (1). Véritable trouvaille de casting, Michael Berryman, chauve interprète de Pluton, trouve ici le rôle de sa vie, et traînera par la suite son visage inquiétant dans maintes séries B sans nous faire oublier sa performance d’agresseur cannibale. Récipiendaire de maintes récompenses à travers le monde, notamment à Londres, Sitges et Los Angeles, La Colline a des yeux assit définitivement la réputation de Wes Craven, propulsé dès lors au rang de nouveau maître de l’épouvante.


(1) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2005

© Gilles Penso

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