LES PREDATEURS (1983)

Tony Scott filme le vampirisme comme un spot de pub en plaçant devant sa caméra un couple d'acteurs débordant de charisme : Catherine Deneuve et David Bowie

THE HUNGER

1983 – GB / USA

Réalisé par Tony Scott

Avec Catherine Deneuve, David Bowie, Susan Sarandon, Cliff de Young, Bessie Love 

THEMA VAMPIRES

Suivant l’exemple de son frère Ridley, Tony Scott fit ses premières armes dans le clip et le film publicitaire avant d’attaquer son premier long-métrage. Mais si les œuvres de son aîné avaient su remarquablement s’affranchir de l’expérience du format court (Les Duellistes, Alien et Blade Runner sont devenus des classiques immédiats du 7ème Art), Tony n’a pas eu cette capacité d’adaptation. Du coup, Les Prédateurs collectionne bon nombre de tics et de clichés hérités du clip des années 80, le maniérisme de sa mise en scène s’avérant souvent agaçant. S’il évoque fatalement le « Carmilla » de Sheridan le Fanu, le scénario de Ivan Davis et Michael Thomas adapte un autre roman, « The Hunger » écrit en 1980 par Whitley Strieber, un écrivain qui avait déjà réussi à moderniser avec brio le thème du loup-garou dans « Wolfen » (publié en 1978 et porté à l’écran deux ans plus tard). 

Les Prédateurs fit surtout parler de lui pour son casting étonnant. Catherine Deneuve et David Bowie y incarnent en effet Mariam et John Blaylock. La première est une femme vampire née en Egypte il y a plusieurs milliers d’années et dotée d’immortalité, pour peu qu’elle se repaisse régulièrement de sang humain. Le second est son époux, rencontré au 17ème siècle et vampirisé pour connaître à son tour la vie éternelle. Chaque semaine, ils écument les boîtes de nuits et ramènent des proies humaines qu’ils vident de leur précieuse hémoglobine. Mais John connaît bientôt les premiers signes d’un vieillissement accéléré, symptôme que tous les amants et maîtresses passés de Mariam ont connu avant lui, et qui semble irréversible. Pour tenter malgré tout d’enrayer le processus, Mariam contacte le docteur Sarah Roberts (Susan Sarandon), spécialiste du sommeil et du vieillissement, et finit par s’éprendre d’elle…

La cosmétique avant tout

Plusieurs séquences des Prédateurs ont marqué les mémoires, notamment le premier meurtre, monté de manière extrêmement nerveuse sur un morceau new wave parallèlement aux méfaits d’un singe en cage basculant soudain dans la brutalité, ou encore la transformation progressive de David Bowie en vieillard dans une salle d’attente, grâce aux maquillages extraordinaires de Dick Smith et John Caglione. Mais le film souffre d’un tempo lent et contemplatif, que les effets de style du cinéaste ne parviennent guère à dynamiser malgré sa propension quasi-systématique à briser la continuité narrative et à refuser les raccords classiques. Ainsi, nonobstant la présence charismatique de Bowie, la beauté glaciale de Deneuve, la conviction de Sarandon, les choix musicaux souvent heureux, les effets spéciaux inventifs et l’érotisme trouble qui nimbe certaines scènes, Les Prédateurs ne parvient pas à captiver un spectateur qui n’est pas dupe. Toute cette cosmétique n’est-elle pas finalement qu’un cache-misère, dissimulant maladroitement une intrigue filiforme et chiche en rebondissements ? Comme ces voiles flottants qui ne cachent que partiellement la nudité alitée des femmes vampires alanguies ? Le climax redonne un petit coup de fouet au film, tous les amoureux décomposés de Mariam surgissant soudain de leurs cercueils en une macabre sarabande. 

© Gilles Penso

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