L’IMPASSE AUX VIOLENCES (1960)

Un remarquable film d'épouvante britannique offrant des rôles inoubliables - et détestables ! - à Peter Cushing et Donald Pleasence

THE FLESH AND THE FIENDS

1960 – GB

Réalisé par John Gilling

Avec Peter Cushing, June Laverick, Donald Pleasence, George Rose, Renée Houston, Billie Whitelaw

THEMA MEDECINE EN FOLIE I TUEURS

En 1827, la chronique d’Edimbourg fut défrayée par l’arrestation de William Burke et William Hare, deux assassins qui approvisionnèrent d’une douzaine de cadavres un chirurgien renommé de l’époque, le docteur Knox. Robert Louis Stevenson en tira une nouvelle en 1884 et de nombreux films s’inspirèrent de ce fait divers sordide, mais L’Impasse aux Violences est probablement le plus marquant d’entre eux. La mise en scène raffinée et le scénario brillant de John Gilling y sont pour beaucoup, tout comme l’interprétation inoubliable de Peter Cushing et Donald Pleasence. Le premier, dans l’une de ses meilleures prestations – ce qui n’est pas peur dire ! – incarne un docteur Knox hautain, odieux avec ses détracteurs, sec comme un coup de trique et très proche du cynisme du Victor Frankenstein qu’il interpréta parallèlement pour la Hammer. Le second s’avère extraordinaire dans le rôle de Hare, un horrible individu ne s’embarrassant guère du moindre état d’âme et dégoulinant de duplicité. Toujours en quête de corps pour ses cours d’anatomie, Knox est très peu regardant sur l’origine de ceux qu’on lui livre régulièrement, même si la plupart d’entre eux sont tout bonnement déterrés dans le cimetière voisin par des fournisseurs sans scrupule.

Voyant là l’occasion rêvée d’arrondir leurs fins de mois, Hare et son complice Burke (George Rose) décident de recourir au meurtre pour proposer à Knox des cadavres d’une fraîcheur imbattable. Le médecin n’est pas dupe, mais à ses yeux la vie d’une prostituée ou d’un vagabond vaut moins que le moindre progrès en chirurgie. « L’individu ne compte pas » n’hésite-t-il pas à déclarer sans retenue. Parallèlement aux exactions de Burke et Hare, filmées avec une violence assez crue pour l’époque, le scénario s’intéresse à deux romances directement liées à l’intrigue principale : celle du docteur Mitchell (Dermot Walsh) avec la nièce de Knox (June Laverick), et celle de l’étudiant Chris Jackson (John Cairney) avec la prostituée Mary Patterson (Billie Whitelaw). Si ces seconds rôles sont tenus par des comédiens moins connus du public, leur performance n’en demeure pas moins remarquable.

Un classique du genre

Serti dans un magnifique cinémascope noir et blanc, bénéficiant d’une reconstitution assez luxueuse de l’Angleterre du 19ème siècle et paré d’excellents dialogues, L’Impasse aux Violences a tous les atours d’un classique du genre. L’apport créatif des producteurs Robert S. Baker et Monty Berman, réalisateurs par ailleurs du fameux Jack l’Eventreur de 1959, y est sans doute pour beaucoup. Gilling lui-même aura du mal a retrouver un tel niveau qualitatif, malgré les œuvres honorables qu’il signera plus tard pour le studio Hammer (La Femme Reptile, L’Invasion des Morts-Vivants, Dans les Griffes de la Momie). Certes, après un climax empruntant volontiers les sentiers battus – les villageois en colère s’arment de torches pour rendre justice eux-mêmes – le film s’achemine vers un final artificiellement moralisateur. Mais en dépit de ce dénouement un peu faible, L’Impasse aux Violences demeure magistral et marque une de ces conjonctions de talents dont est friand tout cinéphile qui se respecte.

 

© Gilles Penso

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