OFFSPRING (2009)

Le sulfureux écrivain Jack Ketchum adapte lui-même l'un de ses romans et dépeint la sauvagerie humaine la plus crue

OFFSPRING

2009 – CANADA / USA

Réalisé par Andrew van den Outen

Avec Art Hindle, Amy Hargreaves, Taylor Piedmonte, T.J. Graye, Erick Kastel, Kelly Carey, Jessica Butler

THEMA TUEURS I CANNIBALES

The LostThe Girl next doorThe Woman… Tous les films qui partent de romans de Jack Ketchum sentent le soufre et traitent de la violence sans détour. Offspring ne déroge pas à la règle, d’autant que c’est l’écrivain lui-même qui en signe un scénario non pas illustré par Lucky McKee, comme souvent, mais par Andrew van den Houten, auparavant producteur de The Girl next door et ensuite de The Woman. Des complices de la première heure donc, l’un et l’autre partageant la même volonté de taper fort. Et, à titre, Offspring n’y va effectivement pas avec le dos de la cuillère, dans le même registre que La Colline a des Yeux. Là où les sauvages de Wes Craven opèrent loin de tout, dans le désert, ceux de Jack Ketchum sévissent dans une zone plus accessible, le loin d’une côte habitée. Avec sur leurs traces l’ancien shérif du bourg qu’ils ont décimé et plusieurs flics, ils s’attaquent à une famille. Ils en enlèvent les femmes, éviscèrent le mari. Une scène parmi les plus dures d’un film qui multiplie les sévices, soucieux de montrer ce que les autres censurent généralement.

Ici, pas question de ménager les âmes sensibles. Ça commence par un bébé mort dans un sac plastique et ça s’achève par un gamin tué d’un coup de hache par un autre gosse. Car on tue beaucoup dans Offspring ; le sang gicle, les crânes explosent, les visages rotissent dans le feu, la chair humaine mijote dans les marmites, un bébé vorace tire sans ménagement sur le sein d’une nourrice malgré elle… Et pour cause ; ses sauvages sont des cannibales en chasse, tous membres d’une même tribu dont les mœurs paraissent remonter à la plus lointaine préhistoire. D’ailleurs, ne vivent-ils pas dans une grotte ? Regrettable que le scénario ne fasse que les esquisser, n’en révèle pas davantage à leur sujet. Volontairement avares d’informations, Andrew van den Houten et Jack Ketchum s’attachent à peine à la personnalité du chef, une féroce matriarche qui tient un homme en laisse…

Une auto-trahison

En adaptant lui-même son roman, le second l’allège pour beaucoup de son contenu, se concentrant sur les aspects les plus graphiques de la traque et de la chasse. Pas loin d’être de constituer un geste d’auto trahison selon beaucoup de lecteurs. Andrew van den Houten et Jack Ketchum auraient-ils gagné à lever à peu plus le coin du voile ? Certainement, de même qu’ils auraient bénéficié d’un développement plus substantiel de la personnalité des victimes. Notamment celle du mari veule, qui se range pratiquement du côté des agresseurs quand les sauvages entreprennent de charcuter sa femme, portant sur leurs dents un rattelier fabriqué à partir de cannettes ! Si, derrière la caméra, Lucky McKee ou le Gregory Wilson de The Girl next door se font regretter, Andrew van den Houten se montre assez capable dans l’ensemble, prenant le parti d’une réalisation d’abord neutre, effacée. Appelé en renfort, Douglas Buck (oui, celui du triste remake de Sœur de sang, mais surtout des Family Portaits) serre les boulons au montage. Mais pas trop, de manière à ce que les détails les plus crus fassent leur œuvre, dérangent. Ce qui était bien l’intention de départ, en même temps que d’épier l’explosion du vernis de la civilisation lorsque les circonstances mettent les bonnes manières à rude épreuve. Les instincts basiques, toujours eux.

© Marc Toullec

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