PRISONNIÈRES DES MARTIENS (1957)

Un grand classique de la science-fiction japonaise qui, avec la patine du temps, s'est mué en icône pop de la fin des années 50

CHIKYU BOEIGUN

1957 – JAPON

Réalisé par Inoshiro Honda

Avec Kenji Sahara, Yumi Shirakawa, Momoko Kochi, Akihiko Hirata, Takashi Shimura, Susumu Fujita, Fuyuki Murakami

THEMA EXTRA-TERRESTRE

Premier film de science-fiction japonais à bénéficier du format cinémascope couleur, Prisonnières des Martiens s’est érigé dès sa sortie en classique du genre, et ce malgré une intrigue des plus improbables qui semble avoir inspiré celle de Mars Needs Women. La jolie fête des moissons qui ouvre le film est soudain perturbée par un curieux incendie de forêt, suivi par un glissement de terrain et par l’arrivée impromptue d’un robot géant et dévastateur. Les habitants de Mystéroïd (et non de Mars, contrairement à ce que laisse imaginer le titre français) ont débarqué sur Terre suite à la destruction de leur planète par une catastrophe nucléaire et exigent deux choses : une parcelle de terrain et surtout quelques jolies terriennes triées sur le volet afin d’assurer leur descendance. Les effets de la radioactivité les empêchent en effet de se reproduire entre eux. Fasciné par les pouvoirs et l’intelligence des envahisseurs, un jeune savant humain se rallie à leur cause. A cette collaboration s’oppose un mouvement de résistance, reflet à peine caché des expériences personnelles qu’Inoshiro Honda vécut pendant la seconde guerre mondiale.

Un véritable grain de folie nimbe la direction artistique et les effets spéciaux du film, assurés par Eiji Tsuburaya, truqueur attitré de tous les premiers Godzilla. Hélas, la réalisation technique s’avère rarement à la hauteur des ambitions initiales. D’où des lignes de cache bien visibles (comme lorsque les protagonistes contemplent l’effet d’un glissement de terrain) et des incrustations sur fond bleu franchement épouvantables (notamment le tank qui avance vers le dôme extra-terrestre). Mais la palme du ridicule revient tout de même au robot des Mysterians, un bibendum caoutchouteux et pataud au vague look de samouraï, affublé d’un bec d’oiseau et de petites antennes, qui sème une panique godzillesque au début du film. Quelques jolies maquettes évoquent les Thunderbirds, mais la plupart d’entre elles ressemblent trop à des jouets pour qu’on puisse y croire une seconde.

Des femmes pour les Martiens

Par ailleurs, certains grands moments d’humour involontaire émaillent le film : le présentateur TV qui, après l’attaque du robot et l’invasion des soucoupes volantes, affirme « cela confirmerait peut-être l’existence des extra-terrestres », ou encore les Mysterians qui choisissent d’après photo les femmes dont ils ont besoin pour se reproduire ! Si on ajoute le look Bio Man avant l’heure des extra-terrestres et les soucoupes volantes à la Ed Wood, on comprend à quel point il est difficile de prendre le film au sérieux, malgré son statut d’œuvre référentielle aux yeux de nombreux fantasticophiles. La seconde moitié de Prisonnières des Martiens est structurée autour d’un affrontement épique entre extra-terrestres et militaires, au cours duquel le rayon des envahisseurs fait fondre les canons et les tanks de l’armée, comme le faisait Gort dans Le Jour où la Terre s’arrêta. Le Japon et les Nations-Unies parviendront finalement à éradiquer la menace grâce à la mise au point des « markalites », de gigantesques antennes paraboliques conçues pour bombarder les Mysterians avec un rayon destructeur imparable.

 

© Gilles Penso

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