VENDREDI 13 (1980)

Un slasher efficace mais sans grande originalité, qui sera pourtant le point de départ d'une longue franchise horrifique

FRIDAY THE 13th

1980 – USA

Réalisé par Sean S. Cunningham

Avec Betsy Palmer, Adrienne King, Mark Nelson, Harry Crosby, Laurie Bartram, Kevin Bacon, Ari Lehman, Jeannine Taylor

THEMA TUEURS I SAGA VENDREDI 13

Promu au rang de genre cinématographique par Psychose en 1960, puis popularisé par La Nuit des masques dix-huit ans plus tard, le slasher a définitivement été banalisé par Vendredi 13. Au vu de l’ « œuvre », on ne peut s’empêcher de se demander pourquoi, comme on ne cesse de s’étonner face à l’incroyable longévité de la série de films qu’il initia. Car cette succession métronomique de meurtres violents, qui calque son mécanisme sur La Baie sanglante de Mario Bava tout en imitant les effets de style de John Carpenter sans hésiter à cultiver un humour gras à la Porky’s, n’a rien à priori de transcendant. Jason Voorhees, le tueur au masque de hockey qui terrorisera des générations d’adolescents, n’est ici qu’un enfant attardé mort avant le début du film, à cause de la négligence des moniteurs d’une colonie de vacances, occupés à boire, se droguer et copuler au lieu de se préoccuper des têtes blondes dont ils sont responsables. Résultat : Jason se noie dans le lac avoisinant, entachant à tout jamais la réputation du camp de Crystal Lake. Vingt ans plus tard, un groupe de jeunes gens revient investir les lieux, avec la ferme intention de relancer les activités du camp et d’oublier le drame passé. Mais ils vont déchanter lorsqu’un tueur redoutable s’évertue à les assassiner un à un, de préférence lorsqu’ils absorbent des substances illicites ou jouent à la bête à deux dos.

Réactionnaire en diable, le meurtrier agit ainsi en sanglant défenseur des bonnes vieilles valeurs morales judéo-chrétiennes d’antan. S’agit-il du fantôme revanchard de Jason, revenu hanter les parages ? La dernière bobine du film révèle la véritable identité du psycho-killer, que nous tairons pour les rares fantasticophiles ne connaissant pas encore le fin mot de l’histoire. Certes, les crimes orchestrés par le maquilleur Tom Savini sont souvent imaginatifs et colorés (une hache plantée en plein visage, une flèche qui s’enfonce dans un œil, une autre qui traverse la gorge d’un malheureux incarné par le tout jeune Kevin Bacon), mais ils ne suffisent évidemment pas à combler l’attente d’un spectateur un tant soi peu exigeant. D’autant qu’entre les assassinats, il ne se passe strictement rien d’intéressant.

Chuintements et halètements

Les acteurs jouent comme des savates, leurs personnages et leurs dialogues n’ont aucune consistance, les violons d’Harry Manfredini s’inspirent lourdement de ceux de Bernard Herrmann (avec tout de même une signature sonore mémorable faite de chuintements et de halètements), Sean S. Cunningham abuse de la caméra subjective pour s’efforcer de créer de la tension (imitant sans vergogne le prologue de La Nuit des masques), et les filles se déshabillent un peu dans l’espoir de tirer le public de sa torpeur. Vendredi 13 s’apprécie donc principalement à l’aide de la touche « accéléré » de la télécommande. A l’issue du film,  l’unique survivante du massacre est frappée par une vision subite et cauchemardesque du monstrueux Jason surgissant des flots, inspirée probablement du dénouement choc de Carrie. Sauf qu’ici, la vision est prémonitoire, puisque l’ami Jason ne cessera, dès lors, de poursuivre son œuvre vengeresse, via des dizaines de longs-métrages à l’intérêt tout à fait discutable.

© Gilles Penso

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