JURASSIC WORLD (2015)

22 ans après Jurassic Park, la franchise créée par Steven Spielberg redémarre en allant au bout du concept initial : un parc d'attractions empli de dinosaures

JURASSIC PARK

2015 – USA

Réalisé par Colin Trevorrow

Avec Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Nick Robinson, Ty Simpkins, Irfan Khan, Vincent d’Onofrio, Omar Sy 

THEMA DINOSAURESSAGA JURASSIC PARK

Malgré leurs morceaux de bravoure, les deux séquelles de Jurassic Park n’arrivaient guère à la cheville de leur illustre modèle. La franchise s’interrompit donc en 2001, faute d’idées neuves et d’engouement du public. Pourquoi la ressusciter quatorze ans plus tard ? Et comment le réalisateur Colin Trevorrow, signataire d’un film indépendant primé à Sundance, allait-il pouvoir prendre à bras le corps un projet aussi pharaonique ? Les premières images du film dissipent nos doutes en quelques secondes, le temps d’une allusion au premier film (l’éclosion d’œufs de raptors), d’un hommage aux pionniers Willis O’Brien et Ray Harryhausen (les images du film Le Monde des Animaux) et d’un gag visuel surprenant (la patte griffue d’un T-rex mais qui s’avère en réalité être celle d’un petit oiseau). Au-delà de son jeu sur les faux semblants, cette facétie visuelle nous ramène aux écrits de Michael Crichton, qui rapprochait la morphologie des oiseaux de celle des dinosaures.

A bien y réfléchir, Jurassic World serait même presque plus proche que Jurassic Park de l’univers de Crichton, reprenant fidèlement le schéma narratif de son film Mondwest : un parc d’attractions futuriste propose une immersion dans le passé à des foules de visiteurs enthousiastes, jusqu’à ce qu’une faille dans le système ne provoque une catastrophe. Dans le film, il est établi que les dinosaures ont été ressuscités depuis deux décennies et n’étonnent plus personne. Un tyrannosaure dévorant une chèvre ou de titanesques sauropodes arpentant les plaines sont désormais des spectacles banals auxquels les teenagers prêtent à peine attention. D’où l’idée de créer une nouvelle espèce de dinosaure mutante susceptible d’attirer à nouveau les foules. Le film nous propose du coup une mise en abîme vertigineuse qui prend sa source dans le premier Jurassic Park. A l’époque, personne n’avait encore jamais vu d’images de synthèses aussi réalistes. Mais 22 ans plus tard, les tours de magie des créateurs d’effets spéciaux ne surprennent plus. C’est exactement ce que raconte Jurassic World, utilisant la résurrection des dinosaures comme métaphore idéale de la révolution numérique.

Les dinosaures n'étonnent plus personne

En adéquation avec son propos, Colin Trevorrow ne cherche jamais à nous en mettre plein la vue. Ses dinosaures sont bien sûr extrêmement impressionnants, mais au lieu de faire jaillir des centaines de créatures aux quatre coins de l’écran, Jurassic World ménage ses effets pour mieux nous surprendre. De fait, le fameux Indominus Rex mutant ne nous est exposé que progressivement, son comportement nous effrayant beaucoup plus que sa simple morphologie. Ce parti pris n’empêche pas la profusion de séquences d’action extrêmement spectaculaires, notamment une battue nocturne qui vire au bain de sang ou une attaque massive de ptérosaures qui fondent sur la foule avec une frénésie destructrice rappelant irrésistiblement Les Oiseaux. Cette volonté permanente de retour aux sources se manifeste aussi par l’utilisation des codes du cinéma de divertissement à l’ancienne. Les deux jeunes héros ressemblent aux enfants des productions Amblin des années 80 et les relations conflictuelles du couple incarné par Chris Pratt et Bryce Dallas Howard évoquent les chamailleries d’Harrison Ford et Kate Capshaw dans Indiana Jones et le Temple Maudit, elles-mêmes héritées du cinéma d’aventure hollywoodien des années 50. Jurassic World est donc un divertissement de très grande qualité, doublé d’un hommage énamouré au premier Jurassic Park et d’une réflexion passionnante sur l’évolution des goûts du public. Voilà de quoi redémarrer sur d’excellentes bases la saga jurassique initiée jadis par Michael Crichton et Steven Spielberg.

 

© Gilles Penso

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