LA NUIT DES VERS GÉANTS (1976)

Jeff Lieberman joue avec nos répulsions les plus viscérales pour imaginer une horrible invasion d'invertébrés rampants

SQUIRM

1976 – USA

Réalisé par Jeff Lieberman

Avec Don Scardino, R.A. Dow, Patricia Pearcy, Jean Sullivan, Peter MacLean, Fran Higgins, William Newman

THEMA INSECTES ET INVERTEBRES

Les distributeurs français de Squirm (littéralement « se tortiller ») se sont un peu laissé dépasser par leur enthousiasme en titrant le film La Nuit des Vers Géants, en référence évidente à La Nuit des Morts-Vivants. Voraces, carnassiers et innombrables, les vers le sont ici, certes, mais pas géants pour un sou, même s’ils dépassent un peu en taille nos bons vieux lombrics. Après un texte d’introduction très sérieux laissant entendre que le film relate un fait divers inexpliqué ayant eu lieu dans une petite ville de Georgie – il n’en est rien, évidemment – le scénario met en vedette Mick (l’inexpressif Don Scardino), un jeune homme venu rejoindre sa petite amie Geri (Patricia Pearcy), qui vit avec sa mère et sa soeur dans la bourgade en question. La veille, une tempête a détruit en partie les installations électriques de la région. Les fils rompus communiquent l’électricité aux entrailles de la terre, d’où émergent des vers affamés et gloutons…

L’action se met alors à avancer à la vitesse du ver de terre, à tel point qu’au bout de trois quart d’heure il ne s’est toujours rien passé, si ce n’est la molle enquête du jeune couple autour d’un squelette non identifié retrouvé dans la campagne. Le plus patient des spectateurs commence donc à bailler d’importance, jusqu’à ce qu’enfin survienne la première scène d’horreur. Brève mais particulièrement gratinée, elle ne déçoit pas. On y voit un prétendant de Geri, le pataud Roger (un R.A. Dow à l’accent du sud outrancier), se montrer un peu trop entreprenant à son égard, au cours d’une partie de pêche. Celle-ci repousse ses avances et ce bon vieux Roger se retrouve les quatre fers en l’air au fond de la barque. Lorsqu’il se relève, il pousse des hurlements, et on le comprend : les vers qui servent d’appât sont en train de rentrer dans la peau de son visage et de le dévorer de l’intérieur ! Le trucage, assez saisissant, est l’œuvre de l’as maquilleur Rick Baker, alors en tout début de carrière.

Le sens de la démesure

On retrouvera Roger plus tard au cours de l’intrigue, dans un état de plus en plus déplorable. Il se met à errer dans les bois comme un zombie au visage ravagé, puis agit carrément comme un ver carnassier lui-même, rampant et cherchant à mordre tout ce qui passe à sa portée, pour finalement périr englouti dans un véritable océan de bêtes grouillantes et rampantes. Car le final du film ne recule devant aucune démesure : les bestioles sortent du pommeau d’une douche, passent par les grilles d’aération, remplissent une baignoire, recouvrent des pièces entières du sol au plafond, engloutissent une vieille dame en train de tricoter… Le tout accompagné d’effets spéciaux rudimentaires mais très efficaces, de gros plans de vrais vers que les bruiteurs ont dotés de cris stridents, et d’une musique stressante de Robert Prince. Mais ce délire final vient trop tard, l’intérêt du public ayant été émoussé depuis bien longtemps. A tel point qu’on se demande si La Nuit des Vers Géants n’aurait pas fait un extraordinaire court-métrage au lieu de ce film lent et besogneux. Même si cela semble incroyable, Sylvester Stallone, Martin Sheen et Kim Basinger furent tour à tour envisagés pour jouer dans le film.

 

© Gilles Penso

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