GREYSTOKE, LA LÉGENDE DE TARZAN (1984)

Christophe Lambert incarne l'un des Tarzan les plus réalistes et les plus mémorables de l'histoire du cinéma

GREYSTOKE, THE LEGEND OF TARZAN LORD OF THE APES

1984 – GB

Réalisé par Hugh Hudson

Avec Christophe Lambert, Andie MacDowell, Ian Holm, Ralph Richardson, James Fox, Cheryl Campbell, Ian Charleson

THEMA EXOTISME FANTASTIQUE I SAGA TARZAN

Jusqu’au début des années 80, le personnage de Tarzan était indissociable de Johnny Weissmüller, poussant son inimitable cri en se balançant de liane en liane, affrontant des crocodiles en caoutchouc à coup de couteau, séduisant la belle Jane en peaux de bêtes affriolantes et jouant avec son inséparable chimpanzé Cheetah. Lorsque les mentalités se modifièrent et que l’Afrique échappa à l’imagerie d’Epinal véhiculée par les colons britanniques, le mythe de Tarzan perdit de sa saveur… Jusqu’à sa résurrection flamboyante dans Greystoke, un magnifique plaidoyer opposant une nature sensible à une civilisation hypocrite. 
Greystoke photo

Artisans de cette renaissance, le scénariste Robert Towne (Chinatown) et le réalisateur Hugh Hudson (Les Chariots de Feu) prirent le parti d’un réalisme absolu, en opposition aux aventures fantastico-épiques des films précédents. L’intrigue prend place en 1886. Suite à un naufrage, Lord John Clayton et son épouse Alice trouvent refuge au beau milieu de la jungle africaine, où ils se bâtissent une cabane précaire. En donnant naissance à son fils, Alice succombe, et John est tué peu après en affrontant un singe agressif. Le bébé est dès lors recueilli par une peuplade de chimpanzés qui l’élève comme l’un des leurs. Vingt ans plus tard, le capitaine Philippe d’Arnot, membre d’une expédition zoologique en grande partie décimée par une attaque de pygmées, découvre cet homme élevé parmi les singes. Reconnaissant en lui le fils de feu John Clayton, il le convainc de le suivre jusqu’en Angleterre. Là, l’homme-singe fait la connaissance de son grand père excentrique, Lord Greystoke, et de sa délicieuse cousine Jane… 

Satire sociale et singes en latex

Le film aborde ainsi le célèbre mythe sous l’angle de la satire sociale, peignant un portrait vitriolé de l’aristocratie britannique colonialiste du 19ème siècle. Le plus savoureux, en la matière, est la capacité d’adaptation de l’homme sauvage à cette société précieuse et ampoulée. Il lui suffit pour cela d’utiliser les dons de mimétisme qu’il a appris parmi les singes, preuve que le nouveau monde qu’il découvre n’est fait que d’apparats et de simulacres. Une grande partie de la réussite de Greystoke repose sur son casting éblouissant. Aux côtés des interprétations délectables de Sir Ralph Richardson (vénérable sorcier dans Le Dragon du Lac de Feu) et Ian Holm (futur Bilbo du Seigneur des Anneaux), on découvre deux visages alors inconnus : Christophe Lambert, époustouflant en homme-animal pris entre deux mondes antithétiques, et Andie MacDowell, dont les sourires radieux exhalent une sensualité indicible. Le pied à l’étrier, tous deux poursuivront d’importantes carrières internationales, mais ils ne retrouveront que rarement l’intensité des rôles qu’ils jouèrent dans cette œuvre-phare. Le film bénéficie aussi des créations incroyables du maquilleur Rick Baker, concevant les faux singes les plus réalistes de l’histoire du cinéma (il se surpassera lui-même à l’occasion de Gorilles dans la brume). La partition pleine d’emphase de John Scott, les magnifiques extérieurs africains mis en lumière par John Alcott et le déchirant dénouement achèvent de porter aux nues ce Greystoke, qui bouleversa à tout jamais la légende imaginée par Edgar Rice Burroughs.

 © Gilles Penso

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