Fred Dekker est un fantasticophile pur et dur, à tel point que tous les personnages de son film portent le nom de cinéastes spécialisés dans le genre : Romero, Hooper, Cronenberg, Carpenter, Cameron, Landis, Raimi, Miner, Cunningham, Dante, De Palma… Jusqu’au journal local qui se nomme le « Corman Clarion ». Ces facéties évoquent celles de Hurlements, d’autant que Dekker utilise Dick Miller, acteur fétiche de Joe Dante, pour lui faire interpréter un armurier, rôle qu’il tenait déjà dans Terminator. Sans parler de cet extrait de Plan 9 From Outer Space qui passe à la télé en arrière-plan. Ce jeu référentiel prend une tonalité franchement parodique au cours d’un rêve de l’inspecteur Cameron, qui reproduit fidèlement le découpage d’une scène célèbre des Dents de la mer. Dommage que Dekker n’ait pas joué la carte du clin d’œil en permanence en dotant son film d’une véritable lecture au second degré. Car il n’ose visiblement pas aborder sous un ton ouvertement comique son histoire de zombies gorgés de sangsues extra-terrestres, comme s’il se sentait trop respectueux du genre pour vouloir s’en moquer. Ainsi, chaque écart humoristique est-il immédiatement rattrapé par un retour immédiat au sérieux. Résultat : le film a toutes les allures d’une série B de SF plutôt distrayante, agrémentée de surcroît d’effets spéciaux efficaces et surprenants (exception faite des grotesques extra-terrestres grimaçants du prologue), mais il ne resta guère vivace dans les mémoires. Cela dit, il est tout à fait possible que James Gunn se soit laissé inspirer par cette Nuit des sangsues pour concocter son délirant Horribilis.
© Gilles Penso