Avec beaucoup de justesse et un talent indiscutable, le scénariste Simon Moore est parvenu à retrouver l’esprit et la forme du roman original de Jonathan Swift, bien plus que toutes les adaptations précédentes des « Voyages de Gulliver ». Même dans le cadre d’un téléfilm de trois heures, parvenir à transposer la majeure partie des péripéties contenues dans ce fameux pavé littéraire est déjà un réel exploit. Ainsi, outre le voyage chez les minuscules Lilliputiens et les gigantesques Brobdingnag, Gulliver rencontre les savants fous de l’île flottante Laputa, des sorciers, des immortels, des hommes-bêtes nommés « yahoos » et des chevaux parlants répondants au doux nom d’« houyhnhnms ». De même, sans autocensure prétextée par le jeune âge du public visé, le script de ces Voyages de Gulliver parvient à retrouver la verve satirique du texte initial, restituant presque mot à mot quelques-unes de ses répliques les plus acerbes. Les dérogations que Moore s’est permises à l’égard du roman n’ont d’autre vocation que d’étayer son propos. Ainsi, alors qu’à l’origine Gulliver rentrait chez lui entre chacun de ses voyages, à l’instar du marin Sinbad dont les aventures inspirèrent ouvertement Swift, il demeure absent de son foyer pendant toute la durée de son périple dans le film. Ce qui permet de renforcer le caractère de Mary, la femme de Gulliver qui, à l’instar de la fidèle Pénélope d’Ulysse, attend patiemment le retour de son époux, en repoussant sans défaillir les assauts d’un entreprenant prétendant.