BOSS LEVEL (2021)

Un ancien soldat est coincé dans une boucle temporelle où une horde de tueurs armés jusqu’aux dents est lancée à ses trousses…

BOSS LEVEL

 

2021 – USA

 

Réalisé par Joe Carnahan

 

Avec Frank Grillo, Mel Gibson, Naomi Watts, Annabelle Wallis, Ken Jeong, Will Sasso, Selina Lo, Meadow Williams, Michelle Yeoh

 

THEMA VOYAGES DANS LE TEMPS

C’est en 2012 que Joe Carnahan commence à développer pour la 20th Century Fox un long-métrage audacieux qui porte alors comme titre Continue. Le réalisateur de L’Agence tout risque et Le Territoire des loups définit à l’époque ce projet comme un film d’action musclé qui reprendrait à son compte la mécanique d’Un jour sans fin. Dès le début, Carnahan souhaite confier le rôle principal à Frank Grillo (interprète de Crossbones dans le Marvel Cinematic Universe). Mais le studio Fox n’est pas emballé et passe finalement son tour. C’est le début d’une longue traversée du désert au cours de laquelle le projet ne cesse d’être repoussé. Les choses ne redémarrent que cinq ans plus tard, lorsque Mel Gibson (qui avait déjà collaboré avec Frank Grillo sur Hors de contrôle) est annoncé dans le rôle de l’antagoniste principal. Le film trouve alors son titre définitif : Boss Level. En 2018, le casting se complète avec deux autres têtes d’affiche : Naomi Watts en ex-femme du héros et Michelle Yeoh dans un rôle secondaire mais déterminant. Carnahan parvient à réunir un budget de 45 millions de dollars, cette enveloppe confortable lui permettant de saturer le film d’effets spéciaux, de cascades, de pyrotechnie, de poursuites de voitures, de fusillades et de combats. Même après son tournage, Boss Level continue d’être retardé. Des complications sans fin liées à sa distribution ne lui permettent d’être exploité qu’en 2021, en DVD, sur la plateforme Hulu puis sur Prime Vidéo. Qu’un film reposant sur la boucle temporelle ait été victime de tant de contretemps ne manque pas d’ironie.

Boss Level ne s’embarrasse pas d’un long prologue explicatif. Dès les premières secondes, la violence et la destruction explosent à l’écran. C’est donc dans le feu de l’action que le spectateur découvre le concept du film, guidé par la voix off désabusée du héros qui se débarrasse d’un agresseur armé d’une machette et évite les tirs de mitrailleuse d’un hélicoptère tout en sirotant son café. Roy Pulver (Frank Grillo donc), ancien membre de la Delta Force, revit sans cesse la même journée au cours de laquelle une horde de tueurs psychopathes armés jusqu’aux dents s’emploient systématiquement à le faire passer de vie à trépas. Chaque fois qu’il meurt, la journée recommence. Pour comprendre la nature de ce phénomène incompréhensible qui le coince dans la même boucle et savoir qui veut sa peau, Roy va devoir se pencher de près sur les expériences scientifiques top-secrètes que mène son ex-femme Jemma (Naomi Watts) sous la direction du mystérieux colonel Ventor (Mel Gibson)…

Plaisir coupable ?

Depuis Un jour sans fin, le concept de la journée qui bégaye a été accommodé à tellement de sauces (Source Code, Edge of Tomorrow, Naked, Happy Birthdead) qu’il semble forcément difficile d’innover en ce domaine. Assumant pleinement l’aspect répétitif de cette mécanique narrative devenue familière du public, Joe Carnahan et ses coscénaristes Chris et Eddie Borey la ramènent à sa source la plus évidente : le jeu vidéo qui consiste à « mourir et réessayer » tout en avançant dans sa mission jusqu’à affronter l’obstacle final, autrement dit le « boss ». Les références directes à l’univers vidéoludique s’affirment à travers le titre même du film, le traitement graphique pixellisé de son générique et plusieurs séquences situées dans un game center. Pour autant, Boss Level ne surligne pas l’influence, pas plus qu’il ne s’amuse à cligner de l’œil vers le public pour le rendre artificiellement complice. Les – très – nombreuses séquences d’action explosives s’enchaînent avec une générosité excessive qui compense l’absence de finesse du film. Un peu idiot, un peu bourrin, Boss Level ne place pas ses ambitions très haut mais déborde d’énergie, porté par la gouaille et l’abatage de Frank Grillo qui crève l’écran avec son visage buriné, son corps d’athlète et son sourire en coin. Fatalement, les autres comédiens restent en retrait, même Gibson malgré son charisme resté intact. Boss Level ne rend peut-être pas plus intelligent mais offre à ses spectateurs une satisfaction régressive très euphorisante. C’est sans doute ce qu’on appelle un « plaisir coupable ».

 

© Gilles Penso

 

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