La terrible minceur du scénario dénote avec la rigueur des œuvres précédentes de la série, et c’est manifestement sur la confrontation de ses trois monstres sacrés que Corman a tout misé, sans pour autant se départir des qualités artistiques habituelles de la collection, notamment une photographie, des décors et des costumes somptueux. Les trois sorciers qui tiennent la vedette du Corbeau jouent sur la tromperie des apparences et bénéficient ainsi de toute la variété de jeu de leurs comédiens respectifs. Vincent Price, de prime abord maladroit et dépassé par les événements, s’avère en réalité en pleine possession de ses impressionnants pouvoirs. Peter Lorre se révèle bien moins pitoyable et couard qu’il ne le laisse paraître de prime abord. Quant à Karloff, il est délicieusement détestable en vieux magicien faussement bienveillant. En second plan, dans le rôle du fils de Peter Lorre, on découvre avec curiosité l’amusante prestation du jeune premier Jack Nicholson, que Corman avait déjà employé dans sa fameuse Petite boutique des horreurs. Le Corbeau s’achève sur un duel de sorciers hautement fantaisiste, au cours duquel le compositeur Lex Barker s’amuse à multiplier les clins d’œil musicaux. Bref, une œuvrette anecdotique mais pleine de charmes, l’un des moindres n’étant pas son impressionnant casting.
© Gilles Penso