BANDITS BANDITS (1981)

Le second long-métrage solo de Terry Gilliam est un conte de fée étrange où se croisent plusieurs personnages historiques et mythologiques…

TIME BANDITS

 

1981 – GB

 

Réalisé par Terry Gilliam

 

Avec John Cleese, Sean Connery, Shelley Duvall, Katherine Helmond, Ian Holm, Michael Pain, Ralph Richardson

 

THEMA CONTES I NAINS ET GÉANTS I VOYAGES DANS LE TEMPS

Après dix ans de bons et loyaux services au sein de la délirante équipe des Monty Pythons, Terry Gilliam s’est mis en tête de réaliser des longs-métrages bien à lui. Si Sacré Graal (co-dirigé par Terry Jones) et Jabberwocky (son premier film solo) participaient encore du délire collectif des joyeux trublions du « Flying Circus », Bandits Bandits s’affirme comme sa première œuvre personnelle. Certes, l’esprit des Pythons est toujours perceptible et plusieurs complices de Gilliam comme John Cleese ou Michael Palin sont de la partie, ce dernier officiant même comme co-scénariste. Mais l’univers de Gilliam surnage explicitement. L’une des grosses erreurs de la campagne marketing de Bandits Bandits aura d’ailleurs été de s’axer sur l’humour nonsensique de l’équipe de La Vie de Brian, alors que la tonalité du film est sensiblement différente. L’ambiance y même parfois oppressante, sinistre, inquiétante, empreinte d’une certaine mélancolie que soutient la belle bande originale écrite par George Harrison, producteur du film. C’est donc tout un cocktail d’émotions complémentaires, mixées tout de même avec une bonne dose de comédie, qui dote ce conte de fée pas comme les autres de sa précieuse singularité.

Bandits Bandits s’intéresse à un petit garçon de onze ans qui s’échappe de la maison banlieusarde et ennuyeuse de ses parents intoxiqués de télévision pour partir voyager à travers le temps et l’espace par le biais d’une série de portes, accompagné par un gang de six nains voleurs qui ont enfreint les ordres de l’Être suprême (autrement dit Dieu en personne). Au cours de son aventure extraordinaire, il rencontre toutes sortes de créatures étranges mais aussi plusieurs célèbres figures historiques ou fictives légendaires. L’une des idées les plus intéressantes du film est justement de démythifier ces « héros » en confiant de surcroît leur rôle à des visages familiers. Napoléon (Ian Holm) est un petit homme bardé de névroses et de complexes, Robin des Bois (John Cleese) un dandy maladroit et égoïste, Dieu (Ralph Richardson) un vieil homme en costume-cravate blasé et fatigué. Nous croisons aussi la route du vaillant Agamemnon (Sean Connery), de l’ogre courbaturé (Robert Vaughn) ou encore du mal personnifié (David Warner)…

En équilibre instable

Tout ce beau monde s’anime dans un film curieux qui s’efforce de canaliser un trop-plein d’idées, d’envies et d’influences sans toujours trouver le bon dosage. Comme toujours chez Gilliam, les idées visuelles folles surgissent avec éclat, le réalisateur optant souvent pour des angles de caméras bas pour faire adopter aux spectateurs le point de vue de son jeune héros et de ses compagnons nains. D’où un sentiment régulier de vertige. La direction artistique, les décors, les effets spéciaux rivalisent d’inventivité, avec une collection de visions délicieusement surréaliste (comme ce géant coiffé d’un navire qui s’invite sur le poster du film). « Lorsque je réalise un film, il s’agit toujours d’une énergie collective », nous confie Terry Gilliam. « C’est ce que j’aime dans ce métier. A l’époque des Monty Pythons, le travail collectif était surtout concentré sur l’écriture et l’interprétation. Aujourd’hui, je travaille avec des auteurs, des acteurs, des charpentiers, des peintres, des musiciens… C’est un groupe beaucoup plus grand, et c’est très gratifiant d’être entouré de gens doués et motivés. » (1) Bâti autour du parcours initiatique d’un enfant s’acheminant vers l’âge adulte, Bandits Bandits s’appréhende comme une œuvre de transition dans la carrière de Gilliam. Car s’il s’agit encore d’une œuvre collégiale, sa filmographie à venir creusera un sillon plus solitaire. Son film suivant trouvera enfin l’équilibre parfait. Ce sera Brazil, chef d’œuvre maudit et impérissable.

 

(1) Propos recueillis par votre serviteur en octobre 2009

 

© Gilles Penso

 

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